Intervention de Catherine Di Folco

Réunion du 18 décembre 2019 à 15h00
Violences au sein de la famille — Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Catherine Di FolcoCatherine Di Folco :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, aujourd’hui, nous nous réunissons de nouveau avec la ferme intention, si ce n’est d’endiguer – le chantier demeure vaste –, au moins de faire reculer la violence que subissent de nombreuses femmes, particulièrement dans le cadre intrafamilial.

Le phénomène des violences conjugales, particulièrement médiatisé au cours des derniers mois, n’est pas récent. Rappelons-nous cette atroce banalité, si bien décrite par Zola, à la fin du XIXe siècle, dans son célèbre roman La Bête humaine. Déjà, à l’époque, le romancier s’interrogeait sur la racine de ce mal, qui poussait certains de ses personnages à commettre, parfois, l’irréparable.

Cette terrible réalité nous oblige, et je me réjouis du caractère conclusif de cette commission mixte paritaire. Je m’en réjouis d’autant plus que plusieurs apports du Sénat ont prospéré au sein du texte adopté par cette commission.

Ainsi en est-il de la possibilité, pour le juge aux affaires familiales, de délivrer une ordonnance de protection à tous les couples, donc même à ceux qui auraient mis un terme à leur vie commune ou qui n’auraient jamais fait le choix de cohabiter. Cette disposition simple me paraît néanmoins essentielle, puisqu’elle permettra, je le crois, de protéger davantage de femmes victimes de violences.

L’article 2 octies, résultant également des travaux de notre commission des lois et qui est demeuré dans le texte issu de la commission mixte paritaire, constitue aussi une avancée souhaitable. En effet, il inscrit dans la loi l’interdiction, pour une personne condamnée pour des faits de violences conjugales, de bénéficier d’une pension de réversion à la suite du décès de son ex-conjoint victime de ces violences. En outre, la position commune trouvée avec nos collègues députés, qui étend le bénéfice de cette disposition au-delà des seuls salariés du secteur privé, me paraît encore plus pertinente. Avec un peu de recul, une telle mesure nous semble presque relever du bon sens.

Je ne peux, bien sûr, faire l’impasse sur la mesure phare de cette proposition de loi de notre collègue député Pradié : le bracelet anti-rapprochement. Une position de compromis a ainsi été trouvée entre les deux chambres, puisque l’efficacité du dispositif sera évaluée dans les trois ans qui suivront la promulgation de la loi. Il nous semblait souhaitable de pouvoir prendre un peu de recul par rapport à un dispositif aussi inédit que celui-ci, en matière civile. Il conviendra notamment d’apprécier de quelle manière les juges aux affaires familiales s’en seront saisis et si ce bracelet aura effectivement permis de répondre à des situations de danger. Il est heureux que les députés aient pris en considération la volonté de prudence du Sénat en la matière.

Malgré l’accord trouvé sur le texte en commission, deux problématiques ont toutefois provoqué des débats mouvementés. Je souhaite les évoquer brièvement.

Il s’est d’abord agi de dispositions, introduites par le Sénat, visant à étendre les cas d’indignité successorale d’une personne condamnée pour violences sur son conjoint ; nous avons achoppé sur cette question, cela a été rappelé. L’absence de véritable navette parlementaire, du fait de l’engagement, par le Gouvernement, de la procédure accélérée sur ce texte, n’a en effet pas permis aux députés d’examiner cette question. Cela est regrettable.

Ensuite, l’autre difficulté que nous avons rencontrée portait sur la question de la suspension de l’autorité parentale d’un parent auteur de violences au sein de la famille, question encore plus sensible que la précédente, dans la mesure où elle risque de se poser au juge de manière beaucoup plus récurrente.

Je pense que la solution à laquelle nous sommes parvenus, après de longues discussions en CMP, est raisonnable. En permettant au juge de suspendre l’exercice de l’autorité parentale en cas de poursuites ou de condamnation pour un crime commis par un parent sur la personne de l’autre parent, nous avons adopté une disposition qui envisage les cas les plus graves. Il sera toutefois nécessaire de légiférer plus avant sur ce sujet. L’objet spécifique de cette proposition de loi ne permettait peut-être pas de traiter la question en toute sérénité. Sans doute aussi les députés ont-ils préféré attendre le texte porté par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale.

Pour conclure, je tiens à remercier notre rapporteur, Marie Mercier, de la qualité de son travail. Elle a su faire preuve de beaucoup d’humanisme à propos d’un sujet particulièrement sensible.

Bien évidemment, le groupe Les Républicains est satisfait du caractère conclusif de la commission mixte paritaire et votera cette proposition de loi.

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