Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la délégation aux collectivités territoriales – cher Jean-Marie Bockel –, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux juste ajouter quelques éléments de réflexion, puisque tout a déjà été excellemment dit par les deux rapporteurs.
S’agissant de la méthode, je pense effectivement que cette coproduction en amont a largement porté ses fruits. C’est une belle œuvre démocratique : d’une part, nous avons eu le grand débat national, avec un nombre foisonnant de contributions des maires et des adjoints au maire de France, et, d’autre part, monsieur le président de la commission des lois, nous avons eu un bicamérisme très performant, avec une qualité de travail assez remarquable entre les deux chambres. Je crois pouvoir le dire au nom du Gouvernement.
Sachez que j’ai pris du plaisir à travailler sur ce texte avec vous toutes et vous tous. Bien souvent, les débats étaient de nature juridique ou technique. Quand il y avait des clivages, ils ne suivaient pas forcément les clivages politiques traditionnels : ils étaient liés soit à des expériences locales, pour lesquelles vous cherchiez légitimement à trouver des solutions, soit à deux sensibilités importantes qui coexistent dans la République, à savoir la défense des libertés locales et l’égalité des élus locaux. En fait, cette concurrence saine et très républicaine entre les valeurs de liberté et d’égalité a largement guidé nos débats, faisant parfois exploser toute forme de clivage au sein des groupes politiques. Même moi, d’ailleurs, j’ai pu être amené à me remettre en question sur mon approche du droit applicable en matière de collectivités territoriales.
Toujours s’agissant de la méthode, je note que nous avons ouvert ou fermé une petite dizaine de codes divers et variés en plus du code général des collectivités territoriales. Des milliers d’amendements ont été examinés en commission et en séance, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, avec, à la fin, une commission mixte paritaire permettant de faire converger le tout. Je n’ai pas l’expérience de la plupart d’entre vous, mais j’ai le sentiment que le fait de boucler un texte territorial en une seule lecture n’est pas chose évidente. Or nous y sommes arrivés, ce qui prouve bien qu’une méthode précise et robuste permet d’arriver à travailler.
Mesdames, messieurs les sénateurs, madame, monsieur les rapporteurs, monsieur le président de la commission des lois, je le reconnais volontiers, le Sénat a pris ses responsabilités sur certains sujets, là où j’ai eu du mal, parfois, à trouver une écoute bienveillante chez certaines associations d’élus. Je le dis très clairement et très calmement, sur les indemnités, sujet délicat et complexe soumis à toutes les démagogies de celles et ceux qui veulent remettre en cause notre modèle démocratique, notamment la démocratie représentative, peu associations d’élus ont pris la peine d’écrire une contribution au Gouvernement. Beaucoup d’entre elles, et notamment l’AMF (Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité), qui demande un statut de l’élu depuis maintenant des années, n’ont toujours pas répondu, au moment où je vous parle, à des courriers du Gouvernement leur demandant quel était leur positionnement sur la question des indemnités des élus.
Pour des raisons démocratiques, il est bon de saluer le courage de la commission des lois, qui, sans le ministre, a su proposer une disposition. Ce courage a clairement marqué les esprits, y compris des députés. C’est pour cela aussi que le dispositif, tel qu’il a été imaginé par le Sénat, a trouvé un aboutissement.
Je voudrais faire quelques commentaires de fond, monsieur le président, mais je ne serai pas long.
Tout d’abord, comme le sénateur Darnaud l’a dit, ce texte ne constitue pas une révolution. Ça tombe bien ! Quand certaines majorités au Parlement ou au gouvernement ont voulu faire la révolution en matière territoriale, nos collègues élus locaux ont, en général, mis des années à s’en remettre. Nous assumions de présenter une loi de réparation et non une loi de révolution. Sans revenir sur tous les éléments de fond, je pense que nous avons tenu nos promesses.
Ensuite, à mon sens, nous avons su collectivement apporter une réponse digne au sacrifice du maire de Signes, au mois d’août dernier. Ce drame a rappelé à nos concitoyens que le maire n’était pas que le patron de sa collectivité, mais qu’il était aussi l’agent de l’État dans la commune. À ce titre, il pouvait être frappé dans sa chair. Un certain nombre d’agressions, dans le département de François Gatel, l’Ille-et-Vilaine, mais également dans la Manche, se sont encore produites récemment. Avec cette loi, nous apportons des solutions techniques, pratiques, opérationnelles, concrètes à nos collègues élus locaux pour mieux les protéger, mieux les défendre sur le terrain. Cela n’élude pas la nécessaire application des règles pénales et des poursuites judiciaires en la matière, mais, au moins, sur le terrain de la protection et de la prévention, nous avons avancé.
Enfin, pour l’accompagnement de l’engagement des élus locaux, je pense que cette loi a un mérite : elle fait un bond en avant sur le terrain culturel. À travers elle, quelles que soient nos sensibilités, nous avons tenu à dire collectivement que nous étions attachés à notre modèle de démocratie représentative localement et que nous souhaitions donner des moyens à celles et ceux qui veulent s’engager pour leurs concitoyens à quelques semaines des élections municipales. Un an après la crise dite des « gilets jaunes », voir réhabilité l’élu municipal dans son engagement, de la Ville de Paris jusqu’à la plus petite des communes de France, est quelque chose qui va dans le bon sens. C’est ça, faire Nation ! C’est ça, célébrer notre République !