Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 18 décembre 2019 à 15h00
Engagement dans la vie locale et proximité de l'action publique — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en première lecture, les apports du Sénat ont permis une amélioration du texte initial par l’intelligibilité que les sénateurs peuvent avoir des besoins des élus locaux. Je tiens ici à saluer le travail de la commission des lois, de son président et des deux rapporteurs, qui a permis de prendre en compte un certain nombre de réalités vécues et d’apporter des réponses et des solutions. Cependant, nous regrettons que les députés LREM aient détricoté dans un premier temps le texte, montrant à cette occasion leur manque de compréhension du terrain local et des enjeux du quotidien des maires.

Le texte de la commission mixte paritaire est de prime abord une belle surprise, car les députés ont pris en considération le fait qu’ils ne pouvaient pas balayer d’un revers de main le travail de la chambre des collectivités sur un tel sujet. Des avancées permettront de faire respirer les communes et leurs élus, dans leurs relations avec les EPCI comme dans leur travail au quotidien : la suppression de la catégorie des compétences optionnelles, la facilitation de la répartition des compétences, l’augmentation automatique des indemnités, l’incitation à la tarification sociale de l’eau, etc.

Cependant, certaines attentes particulièrement explicites des élus locaux sont passées sous les fourches caudines de la majorité présidentielle, qui semble craindre d’aller trop loin, qui n’ose pas ou qui ne souhaite pas : chacun jugera ! Je pense particulièrement aux compétences « eau et assainissement », éternel conflit auquel nous pensions enfin avoir mis fin en supprimant l’obligation de transfert. Finalement, au lieu d’aller vers la simplicité, si chère à certains, le texte propose une redélégation afin d’en affirmer le caractère intercommunal. Il faudra suivre à terme les incidences de cette décision dans le rapport des communes au sein même de leur intercommunalité.

Le travail parlementaire aura permis d’identifier des problèmes. Cependant, nous regrettons non pas qu’un certain nombre de réponses ne se trouvent pas dans ce texte – c’était prévu –, mais que ces réponses ne se trouvent pas non plus dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du projet de loi de finances pour 2020.

Il n’est qu’à prendre l’exemple des intercommunalités. Il est regrettable d’avoir renvoyé les débats sur les communautés urbaines et les métropoles à un futur projet de loi, dont les contours ne seront pas tracés avant plusieurs mois, et non pas plusieurs semaines, et qui semble davantage une façon de repousser les problèmes, y compris pour les plus petites communes au sein des métropoles.

Il n’est qu’à prendre encore l’exemple des nouveaux pouvoirs de police des maires et des forces de police municipale. Il ne faudrait pas donner le sentiment que les maires seraient les seuls responsables de la sécurité ou de la tranquillité publique – chacun utilisera l’expression qui lui agrée. C’est en effet aujourd’hui la préoccupation première des habitants pour les prochaines élections municipales. Rappelons que la question de la sécurité est et doit rester une compétence régalienne. Or, au vu du déploiement – du non-déploiement, devrais-je dire – de la gendarmerie comme de la police, de la difficulté à satisfaire tous les postes, des fermetures et restructurations subies depuis de nombreuses années, les maires se retrouvent souvent seuls à répondre à ce besoin de sécurité exigé par nos concitoyens.

Il n’est qu’à prendre enfin l’exemple des conditions de travail et du quotidien des élus locaux. Nous sommes pour les mesures prévues, telles qu’elles sont inscrites à l’issue de la commission mixte paritaire. Cependant, nous ne pouvons qu’être inquiets, puisque la pression financière exercée aujourd’hui sur les collectivités peut en limiter l’effectivité.

Enfin, la démocratie locale doit être développée par de nouveaux outils et les services publics qui font le lien entre les citoyens et le politique. Or la liste de ceux qui disparaissent est nombreuse : finances publiques, trains, hôpitaux, plus largement la présence territoriale de l’État dans nos départements. À ce rythme-là, dans quelques mois, il sera plus rapide de citer les seuls services publics restant dans nos territoires.

Monsieur le ministre, au quotidien, c’est à tout cela que les élus locaux de notre pays sont confrontés. La difficulté à constituer des listes pour les prochaines élections, et ce quelle que soit la taille de la commune, qu’ils expriment aujourd’hui est celle-ci : être élu, oui, mais pour quoi faire demain ? Quels moyens pour répondre aux besoins des populations ?

Certes, ce texte marque un coup d’arrêt à la mécanique décriée lancée par la loi NOTRe. Il signifie que la mobilisation et les craintes des élus commencent enfin à être entendues, bien que l’examen du texte par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale laisse planer le doute quant à cette finalité.

La crise de l’engagement a besoin d’une véritable réponse et les collectivités territoriales doivent être revitalisées, en termes de services publics, en termes humains, en termes de démocratie locale et plurielle.

Nous nous abstiendrons sur ce texte.

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