Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au moment même où se tenait le Conseil européen des 12 et 13 décembre, le Royaume-Uni nous adressait enfin un message clair sur le Brexit. Avec cette victoire sans appel de Boris Johnson, le peuple britannique nous dit enfin ce qu’il veut, après plus de trois ans d’une incertitude qui a affaibli l’Europe dans son ensemble. Nous regrettons le Brexit, contresens historique majeur, mais nous respectons le choix du peuple britannique.
De nouvelles négociations sur la relation future vont s’ouvrir. Des questions épineuses se poseront.
Le compromis trouvé sur la frontière irlandaise, le fameux « backstop », sera tout sauf simple à mettre en œuvre. Je le dis avec force : l’intégrité du marché unique européen doit être préservée.
Le groupe de suivi sur le Brexit, coprésidé par les présidents Cambon et Bizet, a révélé les risques pesant sur l’intégrité territoriale du Royaume-Uni du fait du Brexit. Les Écossais, qui avaient voté à 62 % pour le maintien dans l’Union européenne, ont massivement accordé leur confiance, jeudi dernier, au parti indépendantiste SNP, qui remporte quarante-huit sièges à Westminster sur cinquante-neuf. La question d’un second référendum sur l’indépendance écossaise se pose donc, comme nous l’avions prédit. La question irlandaise elle-même pourrait rebondir, alors que les unionistes font partie des grands perdants de cette élection.
Notre groupe de suivi a enfin pointé le risque d’un dumping fiscal, social et réglementaire aux frontières de l’Europe, avec le fameux « Singapour sur Tamise ». La forte légitimité dont bénéficie désormais Boris Johnson pourrait l’inciter à frapper vite et fort. Restons vigilants dans la nouvelle phase de négociation. La relation future devra maintenir les intérêts européens et aboutir à un degré élevé de coopération avec le Royaume-Uni, en particulier sur les plans de la sécurité et de la défense. J’invite le Gouvernement à profiter de la célébration des dix ans du traité de Lancaster House, en novembre prochain, pour obtenir des avancées fortes en la matière. La commission des affaires étrangères va préparer cette échéance avec son homologue britannique.
La défense européenne, justement, doit être une priorité. Le budget du Fonds européen de la défense (Fedef) est « une ligne rouge pour la France », nous avez-vous dit ici même, madame la secrétaire d’État. Dont acte ! La commission des affaires étrangères et de la défense estime que nous ne pouvons pas manquer le tournant du Fedef.
Le Conseil européen a rappelé son opposition aux activités de forage illégales de la Turquie dans la zone économique exclusive de Chypre et a estimé que le protocole d’accord entre la Turquie et la Libye sur la délimitation en mer Méditerranée violait le droit. Je tenais à réaffirmer ici sans équivoque notre solidarité avec la Grèce et Chypre en ce qui concerne ces actions de la Turquie.
Madame la secrétaire d’État, l’Union a une nouvelle page de son histoire à écrire. Nous comptons sur vous pour qu’elle soit ambitieuse.