La référence à la notion de mixité sociale risque, comme souvent, de justifier des discriminations à l'encontre des plus démunis, des immigrés et des populations marginalisées, au bénéfice des classes moyennes, que tout élu ou bailleur a tendance à vouloir attirer.
Comme l'explique la sociologue Sylvie Tissot, l'idée de mixité sociale n'est pas condamnable en soi, mais, loin de répondre au manque de logements sociaux, elle masque des problèmes beaucoup plus profonds. Que des pauvres et des riches cohabitent, c'est une très bonne chose, mais cela n'empêche pas les inégalités de demeurer. La mixité sociale ne suffit donc pas.
Si, trop souvent, l'éloge de la mixité sociale aboutit, dans les banlieues, à des « cadeaux » accordés aux classes moyennes, l'un des pires effets de l'exaltation de la mixité ethnique qui l'accompagne souvent et implicitement consiste à légitimer les discriminations ethniques dans l'accès au logement social.
Bailleurs et élus sont, en effet, réticents à l'idée d'accueillir un trop grand nombre de familles immigrées, considérées comme des familles à problèmes et repérées, en toute illégalité, par des critères tels que le patronyme, le lieu de naissance, la nationalité ou le nombre d'enfants.
Au nom de la mixité, ces acteurs du logement se croient autorisés à limiter l'accès de ces familles aux HLM, alors que c'est souvent le seul moyen dont elles disposent pour se loger dignement, tant sont décourageantes les discriminations ethniques qui s'exercent au sein du parc locatif privé. Et je ne parle pas de la difficulté, pour les immigrés et leurs enfants, de trouver des garants reconnus comme tels par les propriétaires !