Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du 15 janvier 2020 à 15h00
Droits sociaux des travailleurs numériques — Rejet d'une proposition de loi modifiée

Muriel Pénicaud :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame l’auteure de la proposition de loi, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, l’essor de l’économie des plateformes numériques de mise en relation de travailleurs avec les consommateurs est l’une des évolutions les plus importantes du marché du travail depuis une dizaine d’années, en France, en Europe et dans le monde. L’impact en est fort, d’un point de vue économique, social et territorial, et ce sujet est d’autant plus complexe qu’il y a une grande variété de structures et une multiplicité d’acteurs, qui ont des aspirations très diverses.

Notre conviction est qu’il n’y a pas de solution unique pour répondre à tous les défis de la construction d’une économie des plateformes financièrement soutenable, techniquement innovante et socialement responsable, ce qui ne veut pas dire qu’elle ne doive pas être socialement responsable. Or que prévoit votre proposition de loi ?

D’abord, d’un point de vue légistique, elle supprime l’ensemble des dispositions du titre IV du livre III du code du travail ; il s’agit de la partie dédiée aux travailleurs utilisant une plateforme de mise en relation par voie électronique. Je rappelle que cette partie du code du travail a été créée par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels et qu’elle a été complétée, très récemment, par la loi d’orientation des mobilités.

Ensuite, vous proposez de remplacer l’ensemble de ces dispositions par un article unique, tel qu’il est rédigé dans l’article unique de votre proposition de loi. Cet article créerait, pour les travailleurs non salariés recourant aux plateformes, l’obligation d’exercer leur activité en tant qu’entrepreneurs salariés ou qu’associés d’une coopérative d’activité et d’emploi.

Votre proposition de loi, cela a été souligné lors de l’examen en commission, présente une double difficulté.

En premier lieu, en créant une obligation générale, elle ne prend en compte ni la diversité des aspirations des travailleurs qui recourent aux plateformes ni la spécificité du projet porté par les coopératives d’activité et d’emploi. En effet, le champ des travailleurs des plateformes, tel que défini dans la proposition de loi, est très large, puisqu’il comprend tous les types de plateformes numériques, indépendamment de leur degré d’intervention dans les conditions d’exercice de l’activité.

Or les utilisateurs des plateformes ne sont pas tous des travailleurs précaires ou des auto-entrepreneurs qu’il faudrait accompagner dans le lancement de leur activité. Certains sont des travailleurs en « free-lance » – pour le dire en bon français

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