Madame la ministre, j’avoue être plus convaincu quand vous exprimez une conviction personnelle que quand vous interprétez les raisonnements du Conseil d’État. Peut-être est-ce parce que votre fibre médicale vous fait aborder les questions d’humanité avec pertinence…
En revanche, sur le plan juridique, vos propos ne m’ont pas du tout convaincu. Il ne saurait y avoir de discrimination quand un traitement différent s’applique à des situations différentes. D’ailleurs, dans les discussions au Sénat, des différences seront faites entre l’assistance médicale à la procréation pour traiter un problème d’infertilité – donc un problème médical – et l’assistance médicale à la procréation pour répondre à la demande d’une femme seule ou d’un couple de femmes qui ne sont pas infertiles d’avoir un enfant. Il faut immédiatement laisser cela de côté.
On invoque parfois le code de déontologie. Il n’est pas applicable à la situation que nous voulons traiter, car il prévoit qu’on peut refuser les soins, par exemple quand on ne se sent pas assez qualifié. Ce sont les soins qui sont demandés par M. ou Mme Untel et que le docteur Dupont ou Durand ne veut pas mettre en œuvre.
Il y a une jurisprudence très abondante de la juridiction ordinale sous le contrôle en cassation du Conseil d’État qui définit l’étendue des obligations déontologiques du médecin. En principe, il ne doit pas refuser des soins, mais une raison professionnelle ou personnelle peut le conduire à les refuser.
Là, ce qu’il faut viser, ce n’est pas une situation individuelle, mais une situation collective. Je pense à l’objection que ferait un médecin face à une demande du service public hospitalier auquel il appartient d’apporter son concours à une catégorie d’actes. Il ne s’agit plus de traiter la demande de Mme Dupont ou de M. Durand.
Dans ce cas, on a besoin de la loi, comme on a eu recours à la loi pour l’interruption volontaire de grossesse, les actes à visée contraceptive et les recherches sur l’embryon. D’ailleurs, à ce propos, l’objection de conscience est prévue dans la loi sur la bioéthique.
L’amendement présenté par M. Retailleau est donc nécessaire si l’on veut couvrir la possibilité pour un médecin hospitalier de ne pas concourir, à l’intérieur de son service de gynécologie obstétrique, à des actes d’assistance médicale à la procréation qui n’ont pas de visée de soins.