Cet amendement vise à rétablir le texte dans sa version initiale.
Au travers de cet amendement, je souhaite supprimer la condition d’infertilité pour tous les publics, reprendre le principe de non-discrimination dans l’accès à l’assistance médicale à la procréation et renvoyer au décret la détermination des conditions d’âge pour l’accès à l’AMP.
Je reviens sur les raisons qui m’ont amenée à déposer cet amendement.
La commission spéciale a souhaité créer deux régimes juridiques distincts : l’un pour les couples hétérosexuels, qui reprend le cadre actuel – l’existence d’un problème médical –, et l’autre pour les couples de femmes et les femmes non mariées. Vous pénalisez ainsi tant les couples hétérosexuels que les couples de femmes et les femmes non mariées.
En effet, vous faites peser sur les premiers une condition, le maintien d’un critère médical, qui n’existera pas pour les secondes. Vous aboutissez donc à une inégalité que nous avons choisi d’éviter, d’autant que celle-ci aboutira forcément à des contentieux, qui obligeront à revenir à un régime identique pour tous.
Je l’ai déjà indiqué, dans 15 % des cas, les AMP de couples hétérosexuels ne reposent pas sur une stérilité médicalement déterminée, car aucune cause médicale ne peut être identifiée. La réintroduction d’un critère médical met en danger les réponses aujourd’hui apportées à ces couples.
Pour ce qui concerne les couples de femmes et les femmes non mariées, l’instauration de deux régimes juridiques pourrait avoir pour conséquence de ne pas rendre effectif le droit ouvert à ces nouveaux publics. En effet, ce double régime risquerait d’induire une priorité de prise en charge en faveur des couples hétérosexuels. Or nous voulons l’égalité d’accès à ce droit pour tous les publics éligibles à l’AMP.
C’est la raison pour laquelle il n’est pas inutile de reprendre, comme tend à le faire le présent amendement, une disposition introduite par les députés dans le texte : « Cet accès ne peut faire l’objet d’aucune différence de traitement, notamment au regard du statut matrimonial ou de l’orientation sexuelle des demandeurs. »
L’adoption du présent amendement permettrait également de revenir au texte du Gouvernement pour ce qui concerne les limites d’âge pour la procréation, afin de prévoir que ces limites soient fixées par décret en Conseil d’État, après avis de l’Agence de la biomédecine.
Il existe aujourd’hui des arguments incontestables pour limiter l’âge du recours à l’assistance médicale à la procréation, en raison notamment des risques médicaux, tant pour les paternités que pour les maternités tardives, ainsi que des risques, pour l’enfant à naître, liés au trop grand écart d’âge avec ses parents. Ces risques sont documentés ; je vous renvoie à l’étude d’impact du projet de loi.
Le critère qui figure dans la loi aujourd’hui – « être […] en âge de procréer » – ne peut être maintenu : il est large, imprécis, sujet à interprétation ; il pose en pratique des difficultés aux équipes médicales ; il est source d’inégalités et il fait l’objet de contentieux contre l’Agence de la biomédecine.
Notre devoir est donc de poser des limites claires et de prévoir des bornes d’âge incontestables pour les équipes. Or la formulation retenue à l’issue des débats de la commission spéciale – « des conditions d’âge encadrées par une recommandation de bonnes pratiques fixée par arrêté du ministre en charge de la santé après avis de l’Agence de la biomédecine » – ne me paraît pas de nature à répondre à ces exigences.
Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite revenir au texte du Gouvernement : lever la condition d’infertilité pour tous les publics, reprendre le principe de non-discrimination dans l’accès à l’AMP et fixer des conditions d’âge d’accès à cette technique par décret.