Intervention de Jacques Bigot

Réunion du 23 janvier 2020 à 14h30
Bioéthique — Article 3

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

Si nous nous disions simplement que nous sommes en train de légiférer en nous appuyant sur l’expérience induite des lois antérieures pour nous projeter vers l’avenir ?

L’un des sujets qui nous préoccupe est de savoir si l’on va intégrer à ces progrès de la médecine et de la conception l’idée que la filiation peut-être multiple. Issue d’un projet parental, c’est une filiation sociologique : un couple réalise son désir d’enfant grâce à l’assistance médicale à la procréation. On peut penser que ces enfants, qui vont recevoir tout l’amour et toute l’éducation que ces couples ont à donner, ne vont pas être malheureux.

Je repense aux propos d’Angèle Préville, ce matin, qui évoquait un de ses anciens élèves. On sent bien que la difficulté, dans ce cas précis, est venue du fait qu’on ne lui a pas parlé. Or l’expérience nous a justement appris qu’entretenir la fiction de la biologie dans un couple qui n’a qu’une filiation sociologique constitue une erreur.

Je rejoins ce qu’a dit notre collègue Gérard Longuet : l’enfant, arrivé à sa majorité, va peut-être se poser des questions sur ses origines, mais sa filiation sera d’abord sociologique. C’est celle-là qui va compter, c’est cette éducation qui a été portée.

Le donneur sait, au moment du don, que son identité pourrait être connue un jour. On lui dit aussi clairement qu’il n’y aura pas de lien de filiation, qu’il ne sera pas possible de reconnaître cet enfant, qu’il n’y aura pas de contrôle de l’ADN… Ce dispositif peut donc parfaitement fonctionner.

Par contre, monsieur le secrétaire d’État, vous avez raison de souligner la souffrance de cet enfant à qui on va dire la vérité sur ses origines – les parents vont d’ailleurs être encouragés à lui en parler au fur et à mesure de son évolution, notamment à l’adolescence –, à qui on aura fait miroiter l’idée qu’il pourrait, comme le suggérait Gérard Longuet, retrouver l’identité du donneur et qui s’opposera finalement au refus de ce dernier.

Nous ne sommes pas dans la même situation que pour l’enfant né sous X, dispositif propre à la France qui n’existe pas dans les autres pays européens : l’enfant né sous X a été porté par sa mère pendant neuf mois. Or on sait que quelque chose se vit entre la mère et l’enfant durant la maternité, qu’il existe une relation entre l’enfant et celle qui le porte pendant toute la durée de la conception. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes quasiment unanimes à penser que la GPA n’est pas la solution. Il ne s’agit pas du même sujet.

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