Monsieur le sénateur, pour beaucoup d’entre nous, il est effectivement très difficile de se projeter vingt ans plus tard. Simplement, des pays ont fait ce choix. On observe alors que le profil des donneurs n’est plus du tout le même. Désormais, les donneurs sont clairement des personnes très engagées qui font un geste altruiste, dans une démarche quasi militante ; ils en parlent beaucoup plus facilement à leur conjoint.
Je le rappelle, le donneur a toujours la possibilité de se rétracter tant que les gamètes ne sont pas utilisés, et tous les gamètes ne sont pas utilisés. Aujourd’hui, il y a environ 400 donneurs de gamètes masculins en France, et il y a seulement eu un peu plus de 200 naissances issues de leur don. Il n’est plus possible de se rétracter après l’utilisation des gamètes.
Nous avons fait ce choix en nous plaçant du point de vue de l’enfant. Si nous permettions aux donneurs de revenir sur leur engagement au bout de vingt ans en retirant l’autorisation d’accès à leurs données, les enfants seraient dans l’incertitude la plus totale. Le risque est que très peu d’enfants puissent avoir accès aux données non identifiantes, voire identifiantes.
Je le rappelle, c’est une commission qui évalue les besoins de l’enfant et qui recontacte les donneurs. Il n’y a pas de mise en contact direct. La commission d’experts recueille la demande de l’enfant et communique ensuite les données non identifiantes. Si cela ne suffit pas à la construction de l’enfant, l’étape suivante est éventuellement la communication des données identifiantes, avec la possibilité pour le donneur de gamètes de refuser le contact. L’obligation porte seulement sur les données identifiantes.
Si nous indiquions que l’accès aux origines est autorisé, mais que le donneur peut se rétracter au dernier moment vingt ans plus tard, la loi n’aurait plus aucune effectivité, et nous aurions un double régime : certains enfants auraient accès à leurs origines, et d’autres non
Le choix du Gouvernement a donc été clair. Nous ne proposons aux donneurs de recueillir leurs gamètes que s’ils s’engagent sur le long terme à permettre l’accès aux origines, c’est-à-dire les données non identifiantes dans le premier cas, puis les données identifiantes dans le deuxième cas.
Nos discussions avec des enfants nés de don ont montré que les données non identifiantes suffisaient souvent à la construction de l’enfant. Tous n’ont pas besoin de connaître le nom du donneur. De toute manière, rien n’obligera ce dernier à être mis en contact.