Intervention de Adrien Taquet

Réunion du 23 janvier 2020 à 14h30
Bioéthique — Article 3

Adrien Taquet :

Vous vous en doutez, cette question a également fait l’objet de réflexions au sein du ministère. C’est la raison pour laquelle nous avions imaginé un système différent de celui retenu par la commission spéciale, que je vous propose de rétablir à travers cet amendement.

Il s’agit de confier à une commission ad hoc, et non au CNAOP, les missions d’accueil et de prise en charge des personnes nées d’une assistance médicale à la procréation avec don. La commission spéciale du Sénat a choisi de confier cette mission au CNAOP, qui intervient, je me permets de le rappeler, dans le cadre de l’accouchement dans le secret.

Dans une première approche, le CNAOP pouvait sembler légitime pour remplir ce rôle, dans la mesure où son objectif essentiel est, en effet, de faciliter l’accès aux origines personnelles. Mais il s’est rapidement avéré que le CNAOP intervient dans un contexte qui s’accorde mal, selon nous, avec la spécificité du don de gamètes. En effet, la situation tant juridique que psychologique des enfants issus d’un don de gamètes et de ceux qui ont été abandonnés ou confiés à leur naissance est radicalement différente.

Confier les missions propres au don de gamètes au CNAOP créerait selon nous un parallélisme infondé entre la situation des enfants nés dans le secret et celle des enfants nés d’une AMP avec tiers donneur. De même, le « don » de gamètes, conçu comme un acte solidaire et responsable, ne place en aucun cas le donneur dans une situation de dilemme ou de détresse assimilable à celle qui caractérise l’abandon d’enfant dans la situation particulière de l’accouchement sous le secret.

Des effets délétères pourraient en résulter, tant pour les donneurs, en conférant une portée au don qui n’est pas légitime et qui peut constituer un frein à leur démarche, que pour les enfants nés d’une AMP avec tiers donneur, en suggérant que leur situation serait identique à celle des enfants relevant du CNAOP, avec finalement le risque de générer, par cet amalgame, un sentiment de « manque » et une souffrance inutile. En outre, la procédure de l’accouchement dans le secret pourrait se trouver déstabilisée du fait de ce rapprochement avec les problématiques spécifiques au don de gamètes et à l’assistance médicale à la procréation.

En résumé, la différence des situations commande la mise en place de dispositifs différents et d’une commission d’accès, destinée à assurer l’interface entre les personnes concernées, différente. Cela n’empêchera évidemment pas la commission ad hoc de tirer profit de toute l’expérience développée depuis des années par le CNAOP.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de rétablir le dispositif initial envisagé par le Gouvernement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion