Intervention de Jacques Bigot

Réunion du 23 janvier 2020 à 21h30
Bioéthique — Article 4 bis

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

Ce qui me paraît clair, mes chers collègues, c’est que nous sommes tous ici convaincus qu’il ne faut pas accepter la GPA. Nous cherchons tous les moyens de faire en sorte qu’elle ne puisse être indirectement régularisée. En même temps, nous sommes préoccupés par la situation et le statut des enfants concernés.

La situation est si peu simple qu’il m’arrive de me dire que, lorsque le législateur ne sait pas comment faire la loi, il est peut-être plus habile, compte tenu du faible nombre de cas, de laisser la jurisprudence trancher au cas par cas.

À cet égard, madame la ministre, votre amendement pose, me semble-t-il, un autre problème : son adoption signifierait une modification substantielle de l’article 47 du code civil. Comment règle-t-on les conflits en droit international privé, dans le domaine de la filiation notamment ? L’article 47 du code civil dispose que « tout acte de l’état civil des Français fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, etc. »

Inscrire dans la loi que l’acte visé audit article doit être conforme à la législation française, ce n’est pas la même chose que de dire qu’il ne faut pas qu’il soit contraire à la législation française ! De ce point de vue, la rédaction de votre amendement pose problème, ce qui justifiera que nous ne le votions pas. L’entrée en vigueur de cette disposition soulèverait des difficultés dans d’autres domaines.

S’agissant de l’article 4 bis tel qu’issu des travaux de la commission, il est trop affirmatif. C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, un amendement d’adaptation est présenté. L’adoption de cet article aurait notamment pour effet d’empêcher, le cas échéant, la reconnaissance de deux pères, alors que la loi française admet la possibilité pour deux pères d’adopter un enfant. Des problèmes difficiles sont donc en vue là aussi.

C’est la raison pour laquelle nous suggérons de reprendre non pas les dispositions de l’amendement présenté par notre collègue Touraine à l’Assemblée nationale, mais la jurisprudence de la Cour de cassation, qui est très prudente. Elle dit simplement que la circonstance que la naissance d’un enfant à l’étranger ait pour origine une convention de gestation pour autrui, prohibée par le code civil, ne peut, à elle seule, faire obstacle à la transcription. Cela n’empêchera pas la jurisprudence de dire ultérieurement, comme l’a fait la Cour européenne des droits de l’homme, qu’il y a d’autres moyens et que les couples concernés peuvent recourir à l’adoption, comme le veut d’ailleurs la logique.

Franchement, si, dans notre folie nous étions capables un instant de faire preuve de sagesse, nous nous en remettrions, pour ces quelques cas peu nombreux, à la Cour de cassation pour trouver la solution, via sa jurisprudence. A contrario, si l’on légifère trop, d’aucuns pourraient penser que l’on ouvre certaines vannes.

Nous soutiendrons plutôt les amendements qui ne vont pas dans le sens du vôtre, monsieur Retailleau, mais, en définitive, je préférerais que nous supprimions purement et simplement cet article.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion