Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 23 janvier 2020 à 21h30
Bioéthique — Article 4 bis

Nicole Belloubet :

En l’état, le texte de la commission me semble trop restrictif, en ce qu’il ne vise que les actes de naissance d’enfants nés à l’issue d’une GPA à l’étranger, en introduisant des dispositions spécifiques réglementant une situation particulière alors qu’il me semble préférable de prévoir une solution plus générale et susceptible d’englober d’autres hypothèses.

Par ailleurs, l’article 47-1 du code civil, dans la rédaction proposée par la commission, produit des effets excessifs. Sa mise en application mettrait la législation française en difficulté par rapport à la Convention européenne des droits de l’homme dans tous les cas où l’adoption par le parent d’intention n’est pas possible. La CEDH a jugé que le lien de filiation doit pouvoir être établi à l’égard du parent d’intention. Or l’assemblée plénière de la Cour de cassation, dans l’arrêt Mennesson du 4 octobre dernier, a estimé que lorsque la filiation n’est plus possible, la transcription de l’acte de naissance étranger à l’égard du parent d’intention est la seule manière de reconnaître à l’état civil français le lien de filiation établi à l’étranger. Dans certains cas, les juges devraient donc écarter cet article 47-1 au motif que son application n’est pas compatible avec la Convention européenne des droits de l’homme.

Enfin, Mme la rapporteure et d’autres ont critiqué l’écriture de l’amendement gouvernemental, pourtant très simple, claire et efficace : « Celle-ci – la réalité – est appréciée au regard de la loi française. » C’est clair parce que la loi française, dans le domaine de la GPA, dispose que la mère porteuse est la mère, tandis que, à l’étranger, il arrive que le droit désigne la mère d’intention comme mère. Il s’agit donc de deux approches différentes. Comment apprécier la conformité à la réalité de l’acte qui désigne la mère d’intention comme mère ? Vous comprenez bien que les choses seront différentes suivant que cette réalité est appréciée au regard de la loi française ou au regard de la loi étrangère ! C’est pourquoi il m’a semblé important, efficace et utile de compléter la rédaction actuelle de l’article 47 par la phrase : « Celle-ci est appréciée au regard de la loi française. » Cela nous donne toute latitude de juger les situations qui se présentent à nous. Nous répondons ainsi précisément à la jurisprudence de la Cour de cassation, ce qui n’est pas, monsieur le président Bas, purement cosmétique !

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