L’incohérence que tend à supprimer l’amendement n° 129 rectifié bis n’en est pas une. En effet, l’alinéa 2 se rapporte à l’article L. 2141-3-1 du code de la santé publique, alors que l’alinéa 19 vise l’article L. 2151-5 du même code. D’ailleurs, pour éviter toute impression d’incohérence, la commission spéciale avait pris soin de préciser à l’alinéa 19 que celui-ci concernait des recherches conduites « en application du présent article ».
Dans le cadre de l’alinéa 2, les recherches cliniques menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation sont destinées à améliorer l’efficacité des procédures. Ce type de recherche a notamment pour objet d’améliorer l’état de fécondation des ovocytes par les spermatozoïdes, d’améliorer la maturation de l’embryon in vitro avant transfert, ou de faciliter son implantation dans l’utérus.
L’alinéa 19, quant à lui, porte sur des recherches réalisées à partir d’embryons surnuméraires : nous sommes certes dans le cadre d’un processus d’assistance médicale à la procréation avec une fécondation in vitro et la création d’embryons, mais il n’y a plus de projet parental.
Le couple, dans cette situation, a trois possibilités : soit il donne ses embryons, pour qu’ils soient accueillis par un autre couple – cela arrive, mais c’est peu fréquent –, soit il fait le choix de les détruire, soit il décide de donner ces embryons surnuméraires à la recherche. L’alinéa 19 traite de ces embryons surnuméraires.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° 71 rectifié quater, les recherches menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation ne sont autorisées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé que si les conditions sont réunies pour préserver la sécurité et l’intégrité, tant de l’embryon que de la femme.
De fait, tout risque pour l’embryon ne peut, dans l’absolu, être écarté dans le cadre d’un essai clinique, comme c’est le cas pour tout autre essai clinique interventionnel, notamment lorsque l’essai consiste à expérimenter un milieu de préparation de cultures destinées à favoriser la maturation et l’implantation de l’embryon.
Dans ce cas, la recherche sera assortie de toutes les garanties qui s’attachent aux recherches biomédicales et ne sera entreprise qu’avec l’autorisation expresse de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Celle-ci se prononcera notamment au regard du caractère satisfaisant de l’évaluation des bénéfices et des risques attendus.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur l’amendement.
L’amendement n° 130 rectifié bis a le même objet que l’amendement n° 71 rectifié quater. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission spéciale est donc également défavorable à cette proposition.
En ce qui concerne l’amendement n° 72 rectifié ter, il faut savoir que les recherches menées sur l’embryon dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation sont nécessairement considérées comme des recherches interventionnelles, et ce pour deux raisons.
Premièrement, elles impliquent un transfert dans l’utérus de la femme et comportent, donc, à tout le moins, une intervention sur cette dernière.
Par ailleurs, plusieurs recherches autorisées dans ce cadre par l’ANSM ont pu impliquer des interventions sur l’embryon par l’expérimentation de milieux de culture favorisant une meilleure maturation ou une meilleure implantation, mais également des interventions sur la femme au travers de stimulations ovariennes ou hormonales.
Deuxièmement, les recherches non interventionnelles ne font pas l’objet d’une autorisation expresse de l’ANSM. Elles ne sont soumises qu’à un avis conforme d’un comité de protection des personnes (CPP) ou, pour certaines recherches, à une déclaration auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). L’assimilation des recherches menées sur l’embryon dans le cadre de l’AMP à des recherches non interventionnelles serait donc moins protectrice pour l’embryon concerné.
En outre, l’article 14 du projet de loi précise déjà – c’est important – qu’aucune intervention de nature à modifier le génome des gamètes ou de l’embryon n’est possible dans le cadre de ce type de recherche.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale demande à son auteur de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 187 tend à inscrire l’interdiction de la différenciation de cellules souches embryonnaires ou pluripotentes induites en gamètes dans les dispositions relatives aux recherches menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation.
Or ces recherches ne peuvent en aucun cas donner lieu à ce type d’expérimentation : elles portent uniquement sur des gamètes issus de donneurs tiers ou du couple candidat à l’AMP, ou sur l’embryon constitué dans ce cadre. Ces gamètes ou embryons ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une manipulation génétique, comme, par exemple, une différenciation, ce que l’alinéa 2 précise clairement.
Enfin, je le redis, aucune intervention ayant pour objet de modifier le génome des gamètes ou de l’embryon ne peut être entreprise : la commission spéciale est défavorable à l’amendement.
S’agissant de l’amendement n° 73 rectifié ter, on ne sait pas si la demande concerne la mise en place d’une mission d’information parlementaire ou d’une mission gouvernementale.
S’il est envisagé de créer une mission d’information parlementaire, cela a évidemment trait à l’organisation des travaux d’une assemblée parlementaire ; cela ne relève donc pas du domaine de la loi.
S’il s’agit de mettre en place une mission gouvernementale, qui se conclurait par la remise d’un rapport, le rapport annuel d’activité de l’ANSM semble plus pertinent pour dresser le bilan des recherches menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation. Une audition de l’ANSM sur l’initiative de la commission des affaires sociales du Sénat serait probablement un meilleur moyen de mettre un coup de projecteur sur un tel bilan.
Au reste, les résultats des essais cliniques autorisés par l’ANSM et conduits dans le cadre d’une procédure d’assistance médicale à la procréation sont ou seront disponibles en fonction de l’état d’avancement de la recherche sur le site clinicaltrials.gov.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission spéciale demande à son auteur de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.