Intervention de Daniel Chasseing

Réunion du 4 février 2020 à 14h30
Bioéthique — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Daniel ChasseingDaniel Chasseing :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les débats sur la bioéthique apportent souvent autant de questions que de réponses aux problèmes qui surgissent de la science. Nous révisons ces lois régulièrement, à un rythme qui d’ailleurs s’accélère pour s’ajuster aux avancées de la médecine, de l’intelligence artificielle et de la science en général.

Le groupe Les Indépendants tient à saluer le travail de la commission spéciale, de ses rapporteurs et de son président. Nous souhaitons aussi féliciter l’ensemble de nos collègues pour la qualité des échanges que nous avons eus : nos positions étaient diverses, mais nous avons su nous écouter les uns les autres et maintenir le débat à la hauteur des enjeux.

Nous avons ainsi su garder au cœur de nos débats la bienfaisance, que l’on retrouve dans l’injonction d’Hippocrate : « D’abord, ne pas nuire. »

Nous avons aussi été attentifs au respect de la dignité de la personne humaine, comme le prévoyaient déjà les lois de 1994. C’est ce qui a justifié le vote par le Sénat de certains amendements ou la suppression de certains articles.

Par ailleurs, même s’il n’y a pas d’eugénisme et même si la GPA ne figure pas dans le texte, son examen a soulevé de nombreux sujets de grande importance. Je n’en citerai que quelques-uns.

L’article 1er, qui est l’article principal, a été voté et a été aussi amendé. La PMA est donc autorisée pour les couples de femmes et les femmes seules. Plusieurs de ses modalités ont été modifiées. Le financement de cet acte, d’abord : notre assemblée a souhaité limiter le remboursement de la PMA par la sécurité sociale aux seuls couples hétérosexuels infertiles. Avant la réalisation de cette PMA, le Sénat a aussi souhaité la mise en place d’une évaluation psychologique.

Si le Comité consultatif national d’éthique s’est montré favorable à cette loi, l’Académie nationale de médecine et le Conseil de l’ordre se sont interrogés sur les effets de l’absence de père sur l’enfant, sans s’opposer néanmoins à la PMA.

Quant à la précarité d’une femme seule qui y recourrait, il faut indiquer que celle-ci ne sera pas toujours acceptée par l’équipe médicale. De plus, il s’agit une monoparentalité choisie et non subie.

Le Sénat a également exclu les PMA post mortem. À titre personnel, je suis favorable à cette rédaction de l’article 1er.

Nos débats ont été l’occasion d’entériner le fait qu’il n’existe pas de droit à l’enfant.

Le Sénat a aussi supprimé la possibilité de réaliser un diagnostic préimplantatoire. Cet article, inséré par la commission spéciale, devait permettre de rechercher des anomalies chromosomiques afin d’éviter les fausses couches dans le cadre d’une PMA ; il n’était nullement question d’eugénisme.

S’agissant des centres habilités à effectuer la PMA, notre assemblée en a exclu les centres privés à but lucratif.

Le maintien de l’interdiction de tous les tests génétiques a été décidé par notre assemblée. Je pense qu’il aurait mieux valu les encadrer, car ils sont de toute façon disponibles sur internet.

À l’article 2, le Sénat a supprimé l’autoconservation des gamètes pour des raisons de pression sociale. Personnellement, je ne pensais pas que les comportements de certains employeurs puissent être aussi violents.

Sur une autre mesure phare, l’accès aux origines d’un enfant issu d’un don de gamètes, le Sénat a modifié l’article 3 du projet de loi. En conséquence des dispositions du texte amendé, à sa majorité, l’enfant qui en fait la demande pourra connaître l’identité du donneur, sous réserve que ce dernier y consente.

Dans le cas d’un couple de femmes, la filiation via reconnaissance conjointe devant un notaire a été remplacée par la voie de l’adoption. J’ai voté cet amendement.

La PMA et le don de gamètes sont deux sujets ayant un fort retentissement dans notre société. Le projet de loi comporte d’autres dispositions qui ne sont en rien secondaires. C’est le cas des dispositions encadrant la recherche sur les embryons, les cellules souches humaines et les cellules pluripotentes humaines.

La commission a supprimé les embryons chimériques animal-homme et homme-animal, et le Sénat l’a suivie sur ce point. La possibilité d’introduire des cellules pluripotentes dans l’animal a été rejetée.

Le Sénat a fait le choix d’autoriser, à titre dérogatoire, les recherches sur les embryons jusqu’à leur vingt et unième jour de développement in vitro. Il faut rappeler que les recherches se font sur des embryons non implantables, avec l’accord du couple. Cette recherche vise à étudier la gastrulation et, ainsi, à comprendre la différenciation des cellules à ce stade, ce qui est très important pour la recherche et les applications médicales.

Au-delà des problématiques liées à la recherche, le texte comporte également des dispositions qui touchent les Français dans leur quotidien. Je pense notamment aux dons d’organes, de cellules hématopoïétiques et de sang, qui sont facilités par l’article 5.

Notre assemblée a aussi confirmé la suppression du délai de réflexion du couple en cas d’interruption médicale de grossesse.

Si ce projet de loi n’a jamais comporté de disposition autorisant la GPA, le Sénat a fait le choix d’insérer un nouvel article afin d’interdire la transcription d’actes étrangers mentionnant un ou des parents d’intention dans les registres de l’état civil. J’ai voté cet amendement.

Ce projet de loi ne peut pas être résumé à ces mesures et bien d’autres sujets y ont été abordés. Nous avons vu au cours des débats que toutes ces questions dépassent les clivages politiques actuels : appliquer la loi de bioéthique tout en permettant des avancées sociétales et en matière de recherche médicale.

Chacun votera conformément à ses valeurs, à ses idées, mais aussi à ses croyances. À titre personnel, je suis globalement favorable aux évolutions apportées par ce projet de loi, même si je regrette certaines suppressions. J’ai bien conscience de ne pas représenter la diversité des opinions de mon groupe. Nous sommes Les Indépendants et, sur ce sujet encore plus que sur tout autre, chacun d’entre nous dispose d’une totale liberté de vote.

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