Intervention de Guillaume Chevrollier

Réunion du 6 février 2020 à 9h00
Accès à l'énergie et lutte contre la précarité énergétique — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Guillaume ChevrollierGuillaume Chevrollier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, aujourd’hui, la précarité énergétique touche 7 millions de personnes en France, soit 233 000 personnes de plus qu’en 2018. Ce constat est terrible. Ces personnes consacrent plus de 10 % de leurs revenus aux dépenses d’énergie dans le logement.

C’est un problème social qui se traduit par une pauvreté et une solitude croissante de la population. Le rapport de la Fondation Abbé Pierre pour 2020 explique que la « monorésidentialité » est l’une des causes principales du mal-logement.

Cet enjeu social est doublé d’un problème de santé publique et triplé d’un problème environnemental, en raison de la déperdition d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre ainsi occasionnées.

En effet, si les augmentations des prix de l’électricité et du gaz peuvent impacter les consommateurs et accroître les difficultés qu’ils rencontrent pour payer leurs factures, c’est parce qu’ils occupent des passoires thermiques, des logements mal isolés.

Les pouvoirs publics ont compris l’importance de ce sujet, mais peinent à rénover ces 7 millions de passoires énergivores. La précarité énergétique est donc bien un enjeu fondamental de la transition énergétique.

La vraie question est, me semble-t-il, la suivante : quel soutien apporter aux ménages pour une transition écologique plus juste et comment faciliter leur accès aux aides de rénovation énergétique ?

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui met ainsi sur la table ce sujet essentiel et vise à compléter les nombreux outils existants au travers de quatre mesures énoncées précédemment.

Plusieurs remarques me viennent à l’esprit.

D’abord, nombreux sont les dispositifs de soutien à la rénovation énergétique des bâtiments mis en place : CITE, éco-PTZ, TVA réduite, chèque énergie, etc. S’ils ont le mérite d’exister, les retours du terrain indiquent qu’ils doivent gagner en lisibilité et en simplification pour être bien stabilisés. Il me semble donc fondamental de commencer par dresser un bilan des dispositifs déjà existants et de contribuer à leur amélioration.

Ensuite, les mesures d’urgence proposées dans ce texte sont curatives et non préventives. Elles risqueraient donc de déresponsabiliser les ménages concernés. En effet, aucune proposition n’est formulée sur le montant de la facture énergétique ou sur les actions à mettre en œuvre pour maîtriser les consommations et, par conséquent, limiter l’accumulation d’une dette substantielle. L’interdiction de procéder à des coupures d’énergie ne pourrait s’entendre que si des mesures tendant à la maîtrise des consommations et à la rénovation énergétique étaient engagées.

Je formulerai la même remarque sur les dispositions fiscales envisagées.

Il me semble que la priorité est d’accompagner les ménages précaires de manière préventive, en leur apprenant les bons gestes de consommation et en les mettant en relation avec les services sociaux ou associatifs pour engager des actions de rénovation, par exemple.

La réponse durable structurelle à la précarité énergétique, c’est la rénovation du parc immobilier existant, ce qui permettra, au passage, de lutter contre l’artificialisation des sols et de préserver la biodiversité, sujet qui vous est cher, madame la secrétaire d’État, à vous comme à nous.

Des investissements accrus permettraient de dépasser les limites des aides actuelles, en finançant mieux des rénovations complètes : chauffage, isolation, ventilation…

Je souligne le rôle déterminant des collectivités locales pour identifier les zones de précarité énergétique et accompagner les ménages. À ce titre, Enedis constitue un vrai soutien. Dans mon département, il a lancé un groupe de travail sur la précarité énergétique avec plusieurs acteurs – collectivités locales, entreprises de proximité et de médiation – et a notamment développé un outil, PrécariTER, qui aide les collectivités à diagnostiquer la précarité énergétique.

Avec la question de la simplification des dispositifs de soutien à la rénovation énergétique des bâtiments, c’est dans la lutte contre la pauvreté et pour la rénovation du parc immobilier que nous devons nous investir pour combattre efficacement la précarité énergétique.

Je voterai contre cette proposition de loi.

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