Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en France, plusieurs millions de ménages sont concernés par la précarité énergétique. En Normandie, un ménage sur six est en situation de vulnérabilité énergétique.
Les territoires ruraux sont en effet très souvent exposés à ces difficultés, du fait de l’ancienneté des logements et de la sociologie de leur population constituée par un grand nombre de personnes aux faibles revenus – retraités, agriculteurs, contrats précaires, minimas sociaux. Leur mode de chauffage est également plus coûteux : fioul ou électricité.
Pour autant, ils en ont assez d’être désignés comme des « délinquants écologiques » au motif que leur empreinte carbone est supérieure à celle d’autres foyers plus aisés, généralement établis en zone urbaine dans un habitat moins énergivore, même si certaines villes ne sont pas épargnées par cette précarité. Ainsi, toujours en Normandie, les villes reconstruites après la guerre sont particulièrement exposées.
Vous le savez, cette situation provoque détresse et colère. Il ne vous a pas échappé, madame la secrétaire d’État, qu’elle a conduit, parmi d’autres raisons, à la crise des « gilets jaunes ». Ceux qui, comme moi, ont, durant plusieurs semaines, eu des échanges avec les manifestants savent combien la revendication d’un meilleur accès à l’énergie ou d’une baisse de ses coûts est prégnante pour certains ménages fragiles.
En tant que vice-président de la commission des affaires étrangères, j’insiste aussi sur le fait que la situation pourrait encore s’aggraver si les tensions géopolitiques perduraient, qu’il s’agisse de la crise avec l’Iran et de ses conséquences dans tout le Golfe, des tensions avec la Russie, exportatrice d’hydrocarbures, ou encore de l’escalade militaire en Méditerranée orientale, justement à propos de l’accès à des ressources énergétiques.
Situation sociale nationale dégradée, contexte international explosif : tout concourt à un certain pessimisme. J’ajoute que les difficultés actuelles de la filière nucléaire française ne sont pas une bonne nouvelle pour le consommateur.
Face à cette situation, la proposition de loi que nous examinons ce matin a le mérite de nous faire débattre de la situation générale et d’évoquer le cas des personnes en difficulté. J’en remercie son auteur, Fabien Gay. Les auditions et travaux de la commission ont conclu à la fragilité juridique de ce texte et conduit à ne pas l’adopter.
Pour autant, comme le souligne la commission, il faut améliorer et amplifier les dispositifs existants. Il faudrait aussi, madame la secrétaire d’État, que les textes existants, comme Daniel Gremillet l’a excellemment souligné, se traduisent en une réalité budgétaire et fiscale au service des plus modestes. Or nous observons exactement l’inverse ! Le rapport de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), publié hier soir, le confirme : une nouvelle fois, la politique que vous menez est en faveur des plus riches et très largement aux dépens des foyers les plus modestes. Cela se confirme de nouveau sur cette problématique énergétique.
Madame la secrétaire d’État, mettez les moyens nécessaires budgétaires et fiscaux au service de cette cause. En ce qui nous concerne, même si l’intention est bonne, nous voterons contre ce texte.