Intervention de Anne-Catherine Loisier

Réunion du 6 février 2020 à 9h00
L'organisation d'un référendum sur la privatisation d'aéroports de paris est-elle une exigence démocratique — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Anne-Catherine LoisierAnne-Catherine Loisier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nos collègues du groupe CRCE nous invitent à un débat que je formulerai en ces termes : le vote du Parlement en faveur de la privatisation d’ADP ne répondrait-il pas aux exigences démocratiques ?

Si l’objectif de créer un Fonds d’innovation pour les entreprises, inscrit dans la loi Pacte, n’a pas été contesté, la méthode a interrogé dès le début, s’agissant de la perte de participation majoritaire de l’État dans le capital d’entreprises du transport aérien, de la régulation des jeux et de la transition énergétique, des entreprises rentables, prospères, versant chaque année plusieurs centaines de millions d’euros de dividendes à l’État, et pour lesquelles un copilotage étatique était jusqu’alors considéré comme d’intérêt public, voire stratégique ! En seulement dix ans, le chiffre d’affaires d’ADP a quasiment doublé, passant de 2 500 milliards d’euros en 2008 à près de 4 500 milliards d’euros en 2018.

Au final, les privatisations de la Française des jeux et d’Engie ont été actées par les deux assemblées, le Sénat ayant rejeté celle d’ADP. L’accord du Parlement était donc obtenu, dans le plus strict respect des institutions et des principes démocratiques, mais pas nécessairement dans celui de l’opinion publique.

Tandis que l’État s’efforçait de diminuer ses dépenses et de consolider ses recettes, l’opinion publique, alimentée par les mouvements sociaux et politiques, s’interrogeait chaque jour davantage sur l’intérêt de vendre des actifs rentables et de renoncer à des rentrées d’argent récurrentes, appauvrissant l’État.

Le mouvement des « gilets jaunes », avec ses revendications de justice sociale et de meilleure redistribution des richesses, a rebondi sur le dossier de la privatisation du groupe ADP, perçue comme une « spoliation » du patrimoine des Français, d’autant que les chiffres du groupe explosaient, ADP devenant le numéro 1 mondial de la gestion aéroportuaire en nombre de passagers et le détenteur du premier aéroport de l’Union européenne, Roissy-Charles-de-Gaulle, à la suite du Brexit.

En avril dernier, 185 de nos collègues se sont associés pour lancer une première procédure de référendum et tenter d’arrêter la privatisation du groupe ADP.

Dans le même temps, le président Macron ouvrait une faille en se déclarant favorable au RIP et en proposant d’abaisser le seuil des soutiens à un million de signatures pour le rendre plus accessible. Dès lors, comment ne pas mettre en actes les paroles du Président de la République ?

À mon sens, l’exécutif s’est mis lui-même dans une impasse démocratique, qu’il appréhende maintenant en raison d’un climat social il est vrai peu propice à un vote apaisé.

Mais existe-t-il une alternative dans le contexte que nous connaissons ? Le vote du Parlement suffit-il encore à légitimer le choix de privatiser ADP face à une proposition de loi référendaire qui dépasse aujourd’hui le million de soutiens, en dépit d’une information quasi inexistante et d’un accès pour le moins complexe ?

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