Je comprends d’autant plus leur frustration quand un certain nombre de candidats, pour des raisons budgétaires qui leur appartiennent et que nous n’avons pas à commenter, ont préféré limiter leur affichage et laisser vierges de nombreux panneaux.
Cette difficulté, donc, je la comprends. Je l’entends. Elle appelle néanmoins, et avant d’aborder précisément le texte, deux remarques.
La première est que la situation provoquée par ces élections était tout de même assez exceptionnelle. Il est extrêmement rare qu’un tel nombre de candidatures soit enregistré. Mais, et c’est ma deuxième remarque, nous devons être prêts à faire face à l’exceptionnel et accompagner les maires dans toutes les situations. C’est la raison pour laquelle une subvention pour frais d’assemblée électorale est mise en place à chaque scrutin. Elle vise à compenser les frais supplémentaires que les communes supportent pour l’organisation d’une élection.
Pour en venir plus précisément au texte, ses dispositions manquent, je le crains, leur objectif et risquent d’être inopérantes ou inapplicables.
La proposition de loi, telle qu’elle a été modifiée par la commission, ne prévoit plus aucune sanction pour les candidats qui choisiraient de ne pas apposer leurs affiches, ou alors de les apposer seulement devant certains bureaux de vote. Il est à craindre que cette mesure retire les effets utiles du texte et que, par mesure de précaution, toutes les listes candidates déclarent leur intention de mettre des affiches et avisent ensuite sur quoi faire réellement.
J’ajoute que le texte, dans sa rédaction actuelle, risquerait de provoquer des problèmes logistiques nombreux et, parfois, insurmontables pour les maires. Ainsi, la possibilité laissée à un candidat ou une liste de changer d’avis jusqu’au début de la campagne électorale pourrait provoquer des problèmes logistiques et de prévision en matière de panneaux.
Autre point appelant des réserves de ma part : j’ai peur que la proposition de loi ne conduise à complexifier notre droit, alors que certains des objectifs visés peuvent être atteints avec des moyens juridiques plus souples, plus simples et plus adaptables aux circonstances.
Ainsi, l’article 1er offre la possibilité aux maires de réduire la dimension des panneaux d’affichage, lorsque le nombre de demandes d’emplacement est supérieur au nombre de panneaux disponibles localement. J’y suis favorable, mais cet objectif peut être atteint par voie de circulaire sans qu’il soit nécessaire de légiférer et, donc, de rigidifier notre droit. Je ne prendrai que l’exemple des dernières élections européennes, pour lesquelles les maires avaient été autorisés, par circulaire, à scinder en deux parties égales les panneaux d’affichage en cas de besoin.
Enfin, je crains que le texte ne fasse peser des contraintes trop fortes, voire insurmontables sur certains candidats ou certaines listes.
La rédaction retenue à l’alinéa 8 de l’article 1er laisse à penser que le maire serait en mesure d’imposer aux candidats la taille des emplacements et, par conséquent, de leurs affiches, en cas de manque de panneaux dans une commune. Cela pourrait provoquer des ruptures d’égalité et des contraintes extrêmement difficiles à supporter pour les candidats ou les listes : imaginons que, dans une même circonscription, il y ait plusieurs jeux de tailles d’affiches à prévoir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte met le doigt, justement, sur une question pouvant préoccuper les maires lors de certains scrutins. Je crois toutefois que nous avons tout à gagner à garder une forme de souplesse dans notre droit et de capacité à nous adapter aux circonstances de chaque élection, plutôt que de risquer de graver dans la loi des mesures dont nous ne pouvons pas avec certitude garantir les effets. C’est pourquoi je ne pourrai pas défendre ce texte, sur lequel le Gouvernement émettra un avis défavorable.