Intervention de Pierre Moscovici

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 2 octobre 2012 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2013 — Programmation des finances publiques - Audition de M. Pierre Moscovici ministre de l'économie et des finances et M. Jérôme Cahuzac ministre délégué chargé du budget

Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des Finances :

Je suis très heureux de participer à la discussion sur ce bon budget. Trois mots en ont guidé l'élaboration. Celui de redressement d'abord : il est indispensable, car le désendettement conditionne la compétitivité de la France, et l'impossibilité d'y parvenir livrerait notre pays pieds et poings liés aux marchés financiers. Rappelons qu'un point de taux d'intérêt représente une charge supplémentaire de 2 milliards d'euros en un an et de près de 14 milliards d'euros en 10 ans. Et cela sans compter l'effet boule de neige qui ne manquerait pas de résulter d'une telle hausse, ce dont d'autres pays peuvent témoigner. C'est aussi un budget de justice, qui épargne les couches populaires, les couches moyennes et les PME ; c'est enfin un budget d'efficacité économique, parce qu'il préserve nos capacités de consommation et d'investissement.

La question du projet de loi organique découlant du TSCG mérite en effet des précisions. Ce projet de loi organique n'est pas un carcan qui viendrait enserrer les dépenses de l'Etat et des collectivités territoriales : c'est un ensemble de règles de procédure, de règles du jeu destinées à nous permettre de mieux piloter les finances publiques, à travers la notion de déficit structurel, c'est-à-dire corrigé des aléas de la conjoncture. Le Conseil constitutionnel ne s'y est d'ailleurs pas trompé : il n'y a pas eu nécessité d'inscrire une « règle d'or » dans la Constitution, il n'y a pas non plus là d'atteinte à notre souveraineté. Il s'agit simplement de codifier le retour à l'équilibre, tel qu'il est posé à l'article 34 de la Constitution. La rédaction du texte va ainsi permettre de trouver un équilibre dans la définition du solde structurel, de finaliser la création du Haut Conseil des Finances publiques, qui sera composé de magistrats de la Cour des comptes et de membres désignés par les présidents des assemblées et ceux des commission des finances, et enfin d'élaborer les mécanismes de correction des écarts.

La notion de circonstances exceptionnelles apparaît dans ce contexte. Elle permet de s'écarter temporairement de la trajectoire préalablement définie. Sur ce point, la loi organique reprend le traité ; selon lui, les circonstances exceptionnelles - qui comprennent explicitement « les cas de récession économique grave » - sont définies par trois critères : l'existence d'un fait inhabituel, indépendant de la volonté des parties contractantes, ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques. Cette définition préserve toute capacité de pilotage des finances publiques et toute capacité contracyclique ; elle est beaucoup plus pertinente que la seule référence à un chiffre nominal. L'objectif de 3 % sera pour autant tenu. J'appelle votre attention sur le fait que nous ne sommes pas en récession, que la France résiste mieux que ses voisins et reste dans le peloton de tête, même s'il avance beaucoup trop lentement. Mais le dispositif prévu permettra d'apprécier à l'avenir l'existence ou non de circonstances exceptionnelles, arme qui se trouve in fine entre les mains du Parlement. Au passage, si aucune disposition ne peut être prise qui méconnaîtrait la libre administration des collectivités territoriales, rien ne justifie qu'elles se trouvent en dehors de ce cadre de pilotage.

J'en viens aux 37 milliards d'euros. Il s'agit de 30 milliards annoncés par la programmation des lois de finances et de financement de la sécurité sociale, auxquels s'ajoutent 4,5 milliards d'euros d'effets de la LFR en année pleine, ainsi que 2,7 milliards d'économies sur l'Ondam. Il convient en outre de distinguer l'effort en dépenses par rapport à la croissance potentielle, qui équivaut à 0,3 points de PIB, soit 6 milliards, et les économies par rapport à la croissance spontanée des dépenses, qui sont elles supérieures à la croissance potentielle, de l'ordre de 10 milliards d'euros. Monsieur Marini, les documents relatifs à ces économies vous seront transmis au fur et à mesure, mais je peux vous assurer qu'elles ne sont ni fictives ni mineures.

En 2013, la masse salariale et le volume des dépenses resteront stables, ce qui représente une économie moyenne de 5 % sur tous les ministères. Le PLF prévoit une économie de 2 % sur les dotations aux opérateurs de l'Etat. Les collectivités territoriales sont associées à ce redressement par la stabilisation de la dotation de l'Etat. C'est un choix revendiqué : les Français veulent que tous les acteurs participent à l'effort demandé, sans que soit remis en cause leur modèle social, ni que soient négligées les priorités définies par le Gouvernement : l'éducation, la sécurité, la justice et l'emploi.

François Marc m'a interrogé sur les plus-values de cession. Leur réforme fait partie intégrante de la réforme fiscale que nous avons engagée. Pour mémoire, les revenus des 1 000 Français les plus riches se composent à 78 % de plus-values. Nous avons mis en place plusieurs atténuations : un système de lissage qui tiendra compte du caractère pluriannuel de la plus-value lors de la première année d'application du barème ; un dispositif d'incitation à la détention longue ; ensuite, nous avons renoncé à supprimer les exonérations pour les départs à la retraite et pour les réinvestissements dans une entreprise ; enfin, les plus-values des jeunes entreprises innovantes sont exonérées. Nous serons d'ailleurs très attentifs, dans la discussion budgétaire, à la situation des start-up et des entreprises innovantes.

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