Pourriez-vous nous détailler l'organisation financière des entreprises dites non financières ?
M. Antoine Peillon. - Les éléments dont je dispose sont issus du récit de Pierre Condamin-Gerbier sur le début de sa carrière. Au début des années 90, il est au service de grandes familles commerciales, qui lui demandent rapidement de participer au montage de structures financières et bancaires dans les paradis fiscaux dépendant de la couronne britannique. Elles ont les moyens, du fait des chiffres d'affaires formidables qu'elles font dans le commerce, de mobiliser très rapidement des cabinets d'experts et des avocats qui les conseillent dans la création de sociétés bancaires. Il est en effet très facile de monter une banque en Suisse, avec tous les avantages que cela comporte. Les résultats permettent de mobiliser des expertises très étoffées. Un avocat très proche d'un assez ancien ministre fait ainsi partie de ce monde des avocats spécialisés dans les montages offshore non déclarés.
Les moyens de la fraude ne sont pas toujours très complexes. En 2005, la gestion des avoirs non déclarés par la banque UBS se faisait au moyen de boîtes en bois et de fiches cartonnées. Dans une première boîte se trouvaient les noms réels des clients et leurs pseudonymes. Dans une deuxième boîte se trouvaient les pseudonymes et les numéros de compte correspondants. Chaque chargé d'affaire gérait environ 300 ou 400 gros clients. Il disposait d'abord du pseudonyme, se rapportait ensuite au numéro de compte qui lui permettait de rentrer dans le système informatique qui n'était composé que de numéros. Le fonctionnement était très artisanal. Les éléments étaient très matérialisés et donc très destructibles. Les pare-feu sont en effet souvent extrêmement rudimentaires.