Qu'ils soient à 8, 20 ou 77, les G sont davantage dans le verbe que dans l'action. Mais la parole est nécessaire à l'acte. J'estime pour ma part que le fait que les chefs d'État et de gouvernement des huit principales puissances industrielles consacrent la moitié de leur temps à parler de fiscalité et que les quatre premiers points de leur déclaration finale en traitent, est un résultat qu'il aurait été difficile d'imaginer il y a quelques années, surtout sous présidence anglaise.
La crise, d'abord financière, devenant budgétaire, puis politique et sociale, le politique reprend la main sur ces sujets, qu'on abordait auparavant avec fatalisme. Le G8 donne le la en réclamant que l'échange automatique devienne un standard, et qu'il soit traité par le G20, auquel un communiqué du G 8 fait référence pour la première fois. Le Premier ministre britannique a insisté sur la nécessité de connaître les bénéficiaires effectifs des trusts. Les dix dépendances britanniques ont pris l'engagement de participer à l'échange automatique de renseignements avec les dix-sept pays européens, rejoints récemment par le Mexique et la Norvège. Nous passons bien des paroles à l'action.
L'OCDE a établi trois listes en matière fiscale : celle de 2000 recensait 35 paradis fiscaux ; en 2002, le nombre de paradis fiscaux non-coopératifs, c'est-à-dire des juridictions qui ne prennent pas l'engagement s'est réduit à 8, puis à 3 en 2008 : le Liechtenstein, Andorre et Monaco ; le 2 avril 2009, un rapport de progrès classait les juridictions en trois catégories ; il s'est bientôt vidé. En réalité, une liste qui fonctionne disparaît. Si l'objectif est punitif, l'intérêt est moindre... Il n'y a plus de liste à l'OCDE. Les précédentes ont eu l'impact escompté, grâce au moteur politique qu'est le G20 : comme il réunit 90% du PIB mondial, lorsqu'il identifie, comme il l'a fait en avril, les 14 pays qui ne passent pas en phase deux, cela a de l'effet.
Le projet BEPS sera sans doute l'un des résultats majeurs du G20 de juillet, où il fera l'objet d'un rapport. Le président Poutine souhaite en faire un point important du sommet des 5 et 6 septembre à Saint-Pétersbourg. La France a indiqué qu'elle souhaitait que ce sujet y soit à l'ordre du jour. BEPS traitera de l'évasion fiscale des sociétés. Les combinaisons des règles internes et internationales sont telles que les multinationales peuvent facilement délocaliser leurs profits ou minimiser leurs impôts. Pour cela, au lieu de jouer sur l'opacité, elles utilisent plutôt des produits hybrides. Par exemple, une société mère française disposant de cash prête à une filiale étrangère rentable des obligations convertibles en actions ; dans l'État de la filiale, c'est une obligation et l'intérêt versé réduit le profit, mais dans l'État de la société mère, c'est une action dont le dividende est exonéré à 95%. La mauvaise articulation de deux souverainetés fiscales réduit ainsi considérablement sa charge fiscale. C'est moins une affaire de transparence que de changement global des règles.
M. François Pillet, président. - Qu'est-ce qui garantit l'efficacité de l'échange automatique ?