Le cadre conceptuel a émergé à la fin des années 1970, aux Etats-Unis. Il est intéressant de noter qu'après la crise de 1929 et les lois de 1933, 1934 et 1935, qui ont créé la Securities and exchange commission (SEC) -à laquelle ressemble beaucoup notre ancienne Commission des opérations de bourses (COB) et notre actuelle Autorité des marchés financiers (AMF)- s'est écoulée une période d'une soixantaine d'années de stabilité financière.
Puis, à la fin du XXème siècle, un certain nombre de phénomènes se sont produit, qui ont formé ce qu'il est convenu d'appeler la financiarisation. Un certain nombre de critiques ont alors été adressées à toutes les normes comptables et à toutes les réglementations nées de cette époque de stabilité, durant laquelle il fallait en finir avec la spéculation qui avait débouché sur la crise de 1929.
Ces normes très stables ne convenaient plus à ce que l'économie était en train de devenir. Celle-ci se fluidifiait, se déterritorialisait, se financiarisait. Les normes -à commencer par les normes comptables- n'étaient pas faites pour cela. Elles ont donc changé progressivement...
Pour ce faire, il a fallu tracer la voie. Cela a consisté, pour le normalisateur comptable américain, à rédiger un cadre conceptuel. Il est toujours en vigueur et sert de référence aux normes comptables américaines.
L'IASB, qui a travaillé dans les années 1980-1990, et dont les normes ont été adoptées par l'Europe en 2002, a copié la démarche américaine, et a décidé d'écrire son propos cadre conceptuel, qui ressemble beaucoup au cadre américain.
Il a été adopté uniquement par l'IASB, et ne l'a pas été par l'Union européenne, qui n'en a pas l'intention, ne serait-ce que parce qu'il n'est pas écrit de manière juridique. Nous ne pourrions l'inscrire dans notre droit européen : ce sont des considérations, des idées, des discussions...
Nous ne voulions pas lui accorder trop d'importance, du fait de son contenu et de sa forme, mais il fallait bien chercher la cause des défauts de ces normes. Nous avons obtenu d'ouvrir le débat à ce propos. Nous ne comptons pas aboutir à une excessive rigidification du texte, compte tenu de l'état du débat, dont je ne sais quelle sera l'issue, mais nous essayons de mettre le doigt sur les problèmes clés, que le nouveau projet a pour effet d'accentuer encore au lieu de les résoudre, et d'avoir un débat si possible public sur les enjeux de ces concepts.
On n'arrivera probablement pas à changer la manière de penser de personnes qui ne possèdent pas de code civil ; en revanche, nous voulons un débat sur le fait de savoir si l'on met dans les comptes ce qui est réalisé ou non. Si l'on met autre chose, on rend possible la procyclicité !