Intervention de Jean Gaubert

Commission des affaires économiques — Réunion du 3 décembre 2014 à 9h30
Transition énergétique pour la croissance verte — Audition de M. Jean Gaubert médiateur national de l'énergie

Jean Gaubert, médiateur de l'énergie :

Le débat sur la CSPE n'a été qu'effleuré à l'Assemblée nationale. Il est vrai que les énergies renouvelables représentent la majeure partie de la dépense et qu'il y a des abus de démarchage, par des entreprises qui ne vous parlent que de gagner de l'argent grâce aux mesures publiques pour la transition énergétique. Tout le monde doit s'y retrouver, l'opérateur comme le consommateur. Les taux de rentabilité annoncés par la CRE pour l'éolien, à 7 ou 8 %, me paraissent trop élevés, ils risquent de nuire aux énergies renouvelables dans leur ensemble puisqu'on ne pourra pas tout payer. Je crois donc qu'il faut être très rigoureux dans les arbitrages de dépenses. Lors d'une table-ronde sur l'éolien off shore, j'entendais récemment qu'il serait très difficile de descendre sous un prix de 200 euros le MWh, pour la simple raison que chaque projet est un prototype - je le sais aussi par le projet développé dans la baie de Saint-Brieuc, où il faut tenir compte de la pression exercée par le marnage sur les embases des installations...

La CSPE en est à 100 milliards d'euros d'engagements d'avance, c'est considérable. Or, qui paie la CSPE ? La contribution était censée nous aider à nous passer des énergies fossiles, pour réduire les gaz à effet de serre - mais on constate que le pétrole est bien moins taxé que l'électricité... On a débattu, dans les années 2000, d'un financement mutualisé entre différentes sources d'énergie, d'une en commun qui aurait financé toutes les énergies renouvelables ; un choix différent a été fait, celui d'un financement par branche d'énergie. Résultat, le pétrole contribue pour les carburants « verts », à hauteur de 200 millions d'euros par an ; le gaz contribue pour la méthanisation, à hauteur de 4 millions d'euros cette année, 6 millions l'an prochain ; et l'électricité débourse quelque 4 milliards d'euros, pour tout le reste... On ne peut pas continuer comme cela, la base contributive est trop étroite. GDF nous rétorquera que ce serait un coût supplémentaire pour le gaz, c'est vrai, mais c'est la condition pour que le consommateur ne paie pas davantage. Qui plus est, on voit que des projets de méthanisation ne seront pas raccordés au réseau de gaz, mais qu'ils vont produire de l'électricité, ce qui les fera émarger à la CSPE... Nous avons donc besoin de la CSPE, mais je crois qu'il faut en revoir le dispositif de fond en comble.

Les colonnes montantes posent des problèmes inextricables sur le plan juridique et certaines présentent des risques de sécurité, ces colonnes datant d'avant la dernière guerre mondiale. L'opérateur en est nécessairement responsable, puisque le réseau va jusqu'au disjoncteur, lequel est toujours après la colonne montante - qui plus est, l'opérateur est déjà souvent intervenu sur la colonne. Il y en aurait pour 6 milliards d'euros de rénovation, d'où la nécessité d'un tour de table financier suffisamment large. L'Assemblée nationale a prévu un rapport, c'est un premier pas, qui ne sera pas suffisant.

La prise en charge partielle des charges du locataire est une piste à explorer, il faut de la coercition quand le propriétaire refuse des travaux d'isolation, le débat doit avoir lieu - au-delà des mesures de la loi « Brottes », qui représentent un progrès.

Oui, la trêve hivernale a été respectée et les chiffres montrent qu'il n'y a pas eu d'effet d'aubaine.

Je suis entièrement d'accord, ensuite, avec l'idée d'examiner la cohérence et l'efficacité de l'ensemble des aides en matière d'énergie, il y a certainement des progrès à faire.

Le retour d'investissement pour le propriétaire, sur les travaux d'isolation, est une vraie question, qui se pose différemment selon que le marché du logement est tendu ou non. Trop souvent, on réduit les économies d'énergie aux économies pécuniaires, alors que l'équation est bien plus large. Il faut considérer aussi que les ménages précaires n'ont pas les moyens de financer une bonne isolation thermique.

L'affouage est une question à part, je ne confonds pas la solidarité, qui est à encourager, et le travail au noir, contre lequel il faut lutter : je parlais bien de ne pas encourager l'économie parallèle, organisée par des entreprises qui veulent s'extraire de leurs obligations sociales.

Faut-il maintenir un tarif social une fois le chèque énergie mis en place ? Je prônerais plutôt une substitution, ce sera plus simple et les exemples de chèque-restaurant, de chèque-vacances, ou encore de l'allocation de rentrée scolaire montrent que ce type de dispositif fonctionne. Les caisses d'allocations familiales, ensuite, détiennent l'information sociale nécessaire à établir l'éligibilité : cela fait d'elles les gestionnaires les plus pertinents pour le chèque énergie.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion