Le sujet de la continuité du dispositif de soutien est une question clé. On peut imaginer qu'il existe deux catégories d'élus, ceux qui, d'un côté, pensent qu'un tel projet peut leur permettre de remporter l'élection - ils sont rares - et, de l'autre, l'immense majorité, qui renonce faute de visibilité. Certains projets ont même été arrêtés pour cette raison. L'absence de visibilité n'est plus seulement une excuse, mais sert à justifier l'impuissance. Quelque part, l'État organise le manque de visibilité. Ceci va à l'encontre de toute ambition.
Même si nous avons eu des discussions à ce sujet, les questions budgétaires vous reviennent plus qu'à nous. Ajouter l'effet cliquet à l'effet couperet empêchera tout développement de projet. Annoncer que tout est fini dans deux ans n'a aucun sens ! Organiser la transition n'est pas une simple formalité : c'est une question essentielle !
Les maires que j'ai rencontrés se demandent pourquoi ils continueraient à mettre en péril les finances de leur commune pour recevoir des gens qui ne viennent chez eux que parce qu'il n'existe pas de bibliothèque universitaire. Ce n'est pas leur métier, d'autant qu'on refuse de leur en donner les moyens.
Sur ce sujet, le plus mauvais élève de France, mais aussi d'Europe, est évidemment Paris. Paris n'est pas seulement sale : on n'y trouve pas non plus de bibliothèque universitaire ! C'est pourquoi autant de personnes fréquentent la Bibliothèque publique d'information (BPI). Où aller quand on est étudiant ?
Je suis frappé que la question ne soit pas évoquée dans le cadre du débat sur les élections municipales à Paris. On assiste comme d'habitude à une sorte de morcellement de l'ambition de l'État, à la fois sur la durée et sur la répartition entre le domaine universitaire et le domaine public.
Quant au conservatisme de la profession, il revêt deux aspects. Le premier est relatif à la mission et concerne les livres, et le second a trait aux horaires. Il faut savoir à quoi l'on sert. Si on est dans la restauration et qu'on veut être chez soi à l'heure du déjeuner et du dîner, il faut changer de métier ! Si on veut recevoir du public, il ne faut pas attendre que celui-ci soit disponible, mais ouvrir lorsqu'il est là ! Je suis personnellement prêt à monter au créneau sur ce sujet. C'est un peu comme si j'écrivais 35 heures par semaine ! Il ne faut pas se moquer du monde.
Les choses sont évidemment plus simples avec les nouveaux entrants dans la profession, mais aussi pour ceux qui ont appelé ce changement de leurs voeux. Dans notre société, on souhaite toujours que ce soient les autres qui donnent d'eux-mêmes.
Les bénévoles, par définition, sont prêts à ouvrir tout le temps, contrairement aux professionnels. C'est une étrange conception du service public !