… notre excellentissime collègue Roger Karoutchi, en effet, vient de déposer une proposition de loi visant précisément à modifier cette procédure.
La sensibilité de ces procès devrait empêcher les auteurs des faits d’échapper aux assises. Un débat public fouillé, la recherche et les auditions d’une cour d’assises permettent à la famille, madame la garde des sceaux, de mieux comprendre les faits et, évidemment, de faire son deuil.
La question est de savoir qui doit trancher l’irresponsabilité pénale : des magistrats professionnels ou un jury populaire ? Il y a là un angle mort dans nos dispositifs. J’ai moi-même déposé une proposition de loi visant à modifier l’article 122-1 du code pénal, laquelle est évidemment très bien complétée par celle de Roger Karoutchi.
Nous pensons, madame la garde des sceaux, au droit des familles. Tout le monde a conscience qu’il est difficile de revoir le dispositif du code pénal, surtout dans les circonstances actuelles, sachant en outre que la psychiatrie en est un peu le maillon faible. Une mission d’information sur ce sujet est d’ailleurs en cours au Sénat.
Je me suis penchée sur ce qui se fait à l’étranger. En Italie, les cas d’exclusion ou de diminution de responsabilité renvoient tous à l’altération totale ou partielle de la capacité de comprendre ou de vouloir de leur auteur.
Il convient de relever que, parmi les facteurs spécifiques d’irresponsabilité, outre les pathologies mentales, l’intoxication ponctuelle ou chronique par consommation d’alcool ou de stupéfiants est largement évoquée dans cinq articles du code pénal. L’auteur, qui savait, ou aurait dû savoir, que sa consommation causerait une altération de ses facultés est jugé responsable. De plus, si l’ébriété a été arrangée sciemment aux fins de commettre un délit ou de se procurer une excuse, la peine est augmentée.
La même disposition s’applique en Allemagne. Le code allemand ne prévoit pas de dispositions spécifiques : c’est la jurisprudence qui a élaboré un dispositif pour conserver la responsabilité de l’auteur commettant un acte délictueux dans un cas d’intoxication dont il souhaitait ou pouvait prévoir les conséquences néfastes et qui n’a pris aucune mesure pour empêcher sa survenue.
Madame la garde des sceaux, il faut traiter ce sujet extrêmement délicat avec discernement. Le travail effectué par les pénalistes, les psychiatres et les parlementaires montre que notre dispositif de responsabilité présente une faille, qu’il y manque un maillon.
Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. On ne peut volontairement commettre un acte délictueux en étant volontairement sous l’emprise de stupéfiants ou de l’alcool et se servir de cet état d’ébriété comme d’une excuse en arguant qu’on n’avait pas conscience de l’acte commis.
Madame la garde des sceaux, je conclurai en pensant aux victimes : combler cette faille les aiderait à faire leur deuil.