Je vous rejoins sur la question des moyens. La réponse judiciaire à la délinquance des mineurs repose sur trois piliers : des textes adaptés, des moyens humains et éducatifs, et des politiques pénales - qui appartiennent au parquet. Nous revendiquons que celles-ci puissent faire l'objet de débats avec les juges du siège. Le fait que le défèrement soit le premier mode de saisine pose problème, car le mineur voit le juge le jour même dans les grandes juridictions, puis plus rien ne se passe pendant deux ans jusqu'au jugement... La politique pénale doit être débattue pour ne pas être appliquée mécaniquement, mais elle doit être adaptée au jeune en fonction de la gravité des faits.
Les lois de protection de l'enfance de 2007 et 2016 ont considérablement développé le recours aux mesures éducatives au civil, en milieu ouvert. Ainsi, des éducateurs peuvent par exemple rencontrer des jeunes filles risquant de tomber dans la prostitution jusqu'à trois fois par semaine. L'équivalent n'existe malheureusement pas au pénal. Un éducateur de la PJJ suit en moyenne 28 enfants, donc il ne les voit au maximum qu'une fois par semaine. Nous devons être capables, pour certains jeunes, peu nombreux - 75% des jeunes ne sont plus revus par le juge des enfants après une première infraction - de mettre les moyens, en milieu ouvert, en les rescolarisant de manière adaptée et en travaillant avec les parents. La PJJ a pour ambition de développer l'offre éducative, de ne pas se limiter à l'hébergement, mais en a-t-elle les moyens ? Nous pouvons en douter. Il faut que les moyens de la PJJ soient renforcés. Actuellement, nous n'avons plus de places d'hébergement pour les mineurs, sauf en CEF, alors que les mineurs concernés sont loin d'être des bandits de grand chemin...
Un juge des enfants suit 500 dossiers d'assistance éducative, en sus du pénal. Ces juges ne sont pas assez nombreux, de même que les personnels des greffes. Si l'on veut créer des audiences pour juger rapidement les mineurs, il faudra poursuivre les efforts, en sus des 70 nouveaux postes de juge des enfants annoncés pour 2020, que nous saluons. Emprisonner rassure, mais ensuite on ne pourra pas réinsérer ces jeunes. Actuellement, la procédure se déroule en deux temps : après la mise en examen, des mesures éducatives sont prévues, puis se tient le jugement.