Intervention de Laurent Duplomb

Réunion du 20 février 2020 à 14h30
Action du gouvernement en faveur de l'agriculture — Débat organisé à la demande du groupe les républicains

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat est important. Pour comprendre ce qu’il se passe aujourd’hui, il faut revenir trois ans en arrière.

À l’arrivée au pouvoir du Président Macron, un espoir immense est né dans la profession agricole, celui de faire comprendre que cette profession avait une attente forte, une attente que nous pourrions résumer par un mot : la reconnaissance. Les États généraux de l’agriculture qui se sont tenus peu après ont amplifié cet espoir, car ils ont donné aux agriculteurs le sentiment d’être enfin compris, que la question de leurs revenus allait pouvoir être traitée.

Puis, il y a eu le discours de la Sorbonne, qui est passé totalement inaperçu, embué par le discours de Rungis. Pourtant, par ce discours, le Président de la République a porté un coup fatal à la PAC (politique agricole commune) : il y était question de créer et de financer d’autres politiques. Ainsi, l’espoir que serait maintenu le budget de la PAC disparaissait, puisque le financement de ces nouvelles politiques ne serait possible qu’en ponctionnant les budgets existants. Dans son discours, le Président de la République a également évoqué la subsidiarité, principe en faveur duquel la France n’a jamais véritablement poussé, contrairement à l’Allemagne. Possibilité a ainsi été laissée à la Commission européenne de formuler sa proposition actuelle.

Par la suite a été votée cette belle loi Égalim (loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), qui avait pour ambition d’améliorer le revenu des agriculteurs. Mais, voilà, elle a plutôt suscité de la déception. Certes, dans son titre Ier, une vraie réflexion a été engagée sur les relations commerciales, puisqu’il y est prévu de relever le seuil de revente à perte et de réduire la pression des promotions. En revanche, le titre II, au terme de l’examen des 2 500 amendements qui avaient été déposés sur ce texte à l’Assemblée nationale, a créé des contraintes supplémentaires pour notre agriculture, contraintes qui non seulement auront un coût, mais qui, surtout, amplifieront la stigmatisation dont elle fait l’objet.

À la suite de cette loi Égalim, notre agriculture a fait l’objet de messages sans cesse plus accusateurs, elle qui n’espérait que reconnaissance. Je pense notamment à la création des zones de non-traitement, dont mes collègues parleront, mais aussi à la stigmatisation du glyphosate et à sa future interdiction en France, contrairement à ce qu’on observe en Europe.

Dans le même temps, on ne se rend pas compte que la France, notre belle France agricole, perd de plus en plus de terrain, notamment si on en juge par l’accroissement des importations. Monsieur le ministre, vous le savez bien, plus d’un jour par semaine, les Français consomment uniquement des produits d’importation. Or plus d’un quart d’entre eux ne répondent pas aux normes que nous imposons aux agriculteurs français.

Et je ne parle même pas de la ratification, par l’Assemblée nationale, du CETA dans une période de plus grand doute pour les agriculteurs !

Tout ce temps perdu, au lieu de se poser la seule et vraie question qui vaille pour moi, celle d’avoir un vrai projet pour l’agriculture française et de le défendre à Bruxelles.

Quelle place voulez-vous, monsieur le ministre, pour l’agriculture française ? Est-ce, à l’horizon de 2035, comme votre ministère s’apprête à en faire la communication, le non-productivisme et la démondialisation ? Si tel était le cas, cela conduirait l’agriculture française à sa perte.

Quels sont les éléments essentiels que vous allez défendre à Bruxelles pour maintenir la PAC ? Quel budget ? J’espère que vous nous donnerez des indications sur ce budget, que vous allez enfin arrêter d’en parler avec des mots et que vous en parlerez avec des chiffres !

Que pensez-vous aussi de l’idée développée par le Président Macron sur la subsidiarité ? Pensez-vous aller plus loin encore dans cette voie, synonyme d’une politique agricole qui serait de moins en moins commune et qui sera, je vous le dis, un vrai danger pour la France ?

Quel verdissement attendez-vous ? Ce verdissement consistera-t-il encore une fois à entraver les agriculteurs ou bien sera-t-il plutôt l’occasion de valoriser les atouts de notre agriculture française pour en faire une force environnementale ?

Qu’allez-vous proposer sur les risques et les aléas ? Allez-vous défendre l’assurance récolte, le stockage de l’eau, l’irrigation, les progrès s’agissant des semences, alors même que le Conseil d’État, par exemple, vient de les classer OGM ?

Monsieur le ministre, je suis conscient que votre tâche est difficile. À mon modeste niveau, si j’étais à votre place, je ne me poserais qu’une seule question : quel projet agricole défendre ?

Plutôt que de formuler des critiques, ce qu’on a parfois trop souvent tendance à faire, je vais essayer de vous aider, …

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