Intervention de Bruno Hérault

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 6 février 2020 à 9h00
Tables rondes sur le thème : qu'y aura-t-il dans nos assiettes en 2050

Bruno Hérault, chef du centre d'études et de prospective du ministère de l'agriculture et de l'alimentation :

Des aliments apparaissent et disparaissent constamment. Le pamplemousse est apparu sur nos tables dans les années 60, le kiwi dans les années 70, l'avocat dans les années 80, le quinoa dans les années 90. Plus récemment sont apparues les graines de goji par exemple. L'histoire de l'alimentation est scandée par ce métissage, amplifié par notre capacité à consommer, désormais, tout produit de la planète. Les dizaines de milliers de références de la grande distribution mettent à notre portée, pour des prix dérisoires, grâce au commerce maritime, des produits du monde entier, sous des formes multiples et variées.

Des dizaines de références ou de produits ont disparu au cours des cinquante dernières années, du topinambour au rutabaga, en passant par le lard, sous la forme qu'il avait. La filière lapins est en crise importante, du fait de la chute considérable de la consommation de cet animal. On ne mange quasiment plus de chevreau, car cet animal s'est rapproché de la sphère domestique et la douceur de la fourrure a conduit à l'assimiler à un jouet. Le cheval était aussi une denrée enrichissante, après-guerre, et est devenu une denrée stigmatisante pour les nouvelles générations. Un système alimentaire est un système socioculturel qui ne cesse d'importer et d'exporter des assimilations, des métissages.

Évidemment, les nouveaux produits dont nous avons parlé ce matin n'entreront pas dans notre alimentation sous la forme qui a été évoquée. La viande cellulaire ne deviendra pas, par exemple, le steak de demain en prenant l'apparence d'un steak de boeuf. Cela passera certainement par un mélange avec d'autres composants tels que des protéines végétales et des exhausteurs de goût. C'en sera peut-être fini du morceau d'animal que nous mangions sous forme de steak. Cette consommation n'était d'ailleurs pas si ancienne car, même dans les riches sociétés occidentales, l'accès à la viande remonte à l'entre-deux-guerres, et même à l'après-guerre pour sa véritable démocratisation. Les systèmes alimentaires sont faits de cycles très courts et très rapprochés. Les nouveaux aliments dont nous parlons vont subir les mêmes variations historiques.

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