Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 25 février 2020 à 14h30
Parquet européen et justice pénale spécialisée — Article 8

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Selon le Gouvernement et le rapporteur, l’article 8 est l’un des points forts du projet de loi.

En effet, le dispositif de cet article, qui s’appuie sur le rapport relatif à la justice environnementale remis le 30 janvier dernier, se veut particulièrement innovant en matière de traitement de contentieux souvent complexes, multiformes et trop peu sanctionnés.

La biodiversité et le vivant n’ont jamais été autant menacés. L’arsenal législatif, pénal et répressif doit donc être porté à la hauteur des défis écologiques, pour la survie même de notre humanité. Nous partageons l’intention de renforcer la justice environnementale et ses moyens. Pour autant, les mesures de ce texte sont largement décevantes.

Ainsi, l’article 8 prévoit la création d’une sorte de transaction pénale dans le domaine environnemental via la création de conventions judiciaires d’intérêt public. À l’image de ce qui existe en matière d’évasion fiscale, il s’agit d’ouvrir au ministère public la possibilité de traiter directement avec les délinquants environnementaux.

D’une part, un tel dispositif existe déjà et il n’y a donc pas de nouveauté, notamment pour les délits les moins graves. D’autre part, nous jugeons ce mécanisme contre-performant en termes de symbole.

Nous entendons les arguments du Gouvernement quant à la rapidité d’une telle procédure et à la possibilité de mesures de réparation ou de compensation environnementale. Pour autant, nous restons dubitatifs, craignant que cette transaction n’ouvre la voie à une justice d’exception, sans procès ni droits de la défense ; une justice externalisée, idéale pour ne pas trop abîmer l’image des entreprises.

Certes, il faut désengorger les tribunaux, mais est-ce vraiment la bonne solution ? Mes chers collègues, je crois que nous prenons la problématique à l’envers. Constater la difficulté qu’il y a à rendre la justice devrait nous orienter non vers la voie de la justice conventionnelle, mais vers celle d’une refonte des délits, des peines et des sanctions.

Ainsi, nous aurions souhaité l’insertion dans le code pénal des infractions constituant des atteintes à l’environnement. Nous aurions également souhaité, comme le préconisait le rapport que j’ai évoqué, la création d’un délit de mise en danger de l’environnement, afin de ne plus devoir attendre l’accident pour agir.

Madame la ministre, vous avez évoqué une refonte de l’échelle des peines, en mentionnant l’exemple de la peine applicable en cas d’exploitation sans autorisation, qui nous renvoie à l’actualité.

Toutes ces pistes sont ignorées par ce projet de loi ; nous le regrettons.

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