Je serai sans doute la première des défenseurs des avocats, à vos côtés, mesdames, messieurs les sénateurs, tant je considère que cette profession, je le dis ici, est indispensable, au quotidien, à notre État de droit, au droit au procès équitable et aux droits de la défense.
Monsieur Kanner, vous avez évoqué une rédaction, un propos ou une politique – je ne sais plus exactement – qui serait « imbécile ». Pour ma part, je ne me permettrai jamais d’utiliser, que ce soit en pensée ou dans mes propos, ce terme à l’égard de vous-même, du groupe que vous présidez ou de l’institution à laquelle vous appartenez.
Puisque vous m’interrogez sur les avocats, un sujet qui n’a évidemment absolument rien à voir avec le dossier dont nous parlons aujourd’hui, je voudrais simplement dire trois choses.
Tout d’abord, le dialogue avec les représentants de la profession n’a jamais été rompu. Je les vois et leur parle au téléphone fréquemment. Je les rencontrerai encore après-demain, pour évoquer un certain nombre de sujets. Il s’agit donc de rendez-vous réguliers.
Ensuite, sur la question des retraites, nous avions dès le départ des postulats qui étaient opposés. Nous souhaitions, car il ne peut pas en être autrement, que les avocats entrent dans le système universel des retraites. Ils ne le souhaitaient pas, pour des raisons que je puis entendre, mais qui ne sont pas compatibles avec le projet ambitieux que nous portons. Il n’est pas possible qu’il y ait un système universel de retraite pour 66 millions de Français et un autre pour 70 000 avocats.
Dans le cadre de ce système universel de retraite, nous avons dit sans cesse que nous étions prêts à prendre en considération les spécificités historiques et actuelles de leur régime. C’est ce que nous avons fait, au travers des très nombreuses propositions que nous avons présentées. Mais, pour dialoguer, il faut être deux ! Et il était très difficile de le faire lorsque l’on me répondait systématiquement par un refus d’entrer dans le système universel.
Nous avons donc formulé une série de propositions, qui se traduisent par des amendements qui seront débattus, du moins je l’espère, cette après-midi ou ce soir à l’Assemblée nationale. En effet, au moment même où nous parlons, ce sujet est évoqué par les députés.
Ces amendements se caractérisent par trois éléments : premièrement, la Caisse nationale des barreaux demeurera l’interlocuteur unique des avocats ; deuxièmement, les pensions de retraite seront en forte hausse, de plus de 11 %, les chiffres étant bien évidemment différents selon les cas de figure ; troisièmement, la hausse des cotisations sera compensée, d’une part, jusqu’en 2029, par un abattement de 30 % pérenne et constitutionnel sur les cotisations retraites, et, d’autre part, après 2029, par l’injection, dans le régime de retraite des avocats, des droits de plaidoirie, qui sont payés par les justiciables, et des contributions équivalentes, qui sont payées par les cabinets d’avocats. Si la CNB le souhaite – elle en décidera –, elle pourra ajouter les réserves.
Autrement dit, nous proposons un principe de solidarité, qui permettra, j’en suis sûre, aux cabinets dont les équilibres économiques sont les plus fragiles – ceux qui perçoivent jusqu’à 80 000 euros de revenus par an – de ne pas être affectés par la hausse des cotisations, qui pour eux sera intégralement compensée ; vous le savez, le revenu moyen des avocats est inférieur à 40 000 euros par an.
Permettez-moi d’ajouter une autre précision. J’ai souhaité rencontrer de nouveau les représentants de la profession d’avocat – la présidente du Conseil national des barreaux, le bâtonnier de Paris et la présidente de la conférence des barreaux de province –, pour évoquer des sujets hors retraite.
Je m’étais en effet engagée à travailler sur l’aide juridictionnelle. Je l’ai fait en introduisant, dans les projets de loi qui vous ont été présentés, des éléments sur l’informatisation de l’aide juridictionnelle et ses prises en compte spécifiques, notamment pour les femmes victimes de violences. Je m’engage ici clairement à rebâtir un système d’aide juridictionnelle qui puisse répondre aux attentes qu’ils portent. Et d’autres sujets feront l’objet de la concertation à venir, je pense notamment à la formation.
Dans l’œuvre de justice, les magistrats et les personnels de justice sont essentiels. Nous ne pouvons pas vivre sans les avocats.
Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement.