Intervention de Éric Kerrouche

Réunion du 3 mars 2020 à 21h30
Accélération et simplification de l'action publique — Article 33

Photo de Éric KerroucheÉric Kerrouche :

Monsieur le ministre, il est important pour moi, en tant que sénateur des Landes, d’intervenir sur le sujet de la forêt, donc sur l’Office national des forêts, l’ONF.

Cette proposition de réforme de l’ONF a un petit air de déjà-vu, me semble-t-il.

Sur la méthode, on utilise la procédure accélérée. On réforme par ordonnances, alors que de nombreux rapports parlementaires ont été produits en la matière, le dernier l’ayant été par le Sénat en juin 2019. On consulte partiellement l’ONF. L’étude d’impact est lacunaire sur le contenu de l’ordonnance. L’avis du Conseil d’État ne retient pas la disposition d’habilitation du Gouvernement à modifier le conseil d’administration de l’ONF. Des calendriers se télescopent ou se chevauchent avec d’autres négociations en cours.

Bref, la méthode en rappelle d’autres, employées pour d’autres textes – je pense, par exemple, à la réforme des retraites.

On use des mêmes éléments de langage, de la même novlangue prônée par « le nouveau management pour les nuls » : on va « simplifier », « moderniser », « professionnaliser », « rationaliser », « resserrer la gouvernance pour plus de performance »…

Sur le fond de la réforme, on nous propose une gouvernance centralisée, qui traduit une volonté d’exclusion des corps intermédiaires, notamment les représentants de la filière bois, les associations de protection de l’environnement, mais aussi les collectivités territoriales. Si la commission spéciale a pu apporter une solution sur ce point, ne doit-on pas penser, comme le laissait suggérer le rapport du Comité Action publique 2022, que les forêts communales ne seront plus, à terme, gérées par l’ONF ?

On veut également réduire des politiques publiques à des équations comptables. C’est votre spécialité !

On euphémise les difficultés des conditions de travail, qui sont pourtant patentes et qu’accentueront encore la défonctionnarisation et les réductions de personnel.

On relègue, bien entendu, les enjeux écologiques et de protection du bien commun.

La forêt publique n’est pas un bien économique comme les autres et l’ONF n’est pas une société anonyme qui doit mener une politique commerciale ! Pour 67 % des Français, la forêt est un espace à préserver pour les générations futures. C’est un bien commun. C’est le principal patrimoine public naturel de la France, après le patrimoine maritime, et il est aujourd’hui fragilisé par des menaces climatiques et sanitaires et par la disparition d’espèces.

Il faut une structure publique qui dispose des moyens nécessaires à l’accomplissement de la mission d’intérêt général de préservation et de gestion durable de la forêt. L’ONF mérite mieux qu’un texte fourre-tout et elliptique.

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