Intervention de Pierre Larrouturou

Commission des affaires européennes — Réunion du 26 février 2020 à 16h35
Budget communautaire — Réunion conjointe avec la commission des affaires européennes de l'assemblée nationale et les membres français du parlement européen sur le prochain cadre financier pluriannuel de l'union européenne

Pierre Larrouturou, député européen :

Je devrai malheureusement vous quitter très vite car j'ai une contrainte. Avant cela, j'aimerais répondre aux quelques remarques qui ont été formulées.

Il ne s'agit pas de créer une banque du climat à partir de rien. Il s'agirait d'une filiale de la Banque européenne d'investissement, avec une gouvernance spécifique et des fonds propres. La BEI agit déjà en ce sens mais, sans fonds propres supplémentaires, elle ne pourra pas doubler ses investissements dans le climat, sauf à couper ses investissements par ailleurs. De plus, même si la BEI parvenait à doubler ses investissements dans le climat, cela ne ferait que 16 milliards d'euros. Nous avons besoin de bien plus. Dans le même temps, il faut augmenter le prix du carbone et développer des alternatives. Il ne s'agit pas de désespérer les gens.

Vous nous ne voulez pas de taxe supplémentaire mais nous avons besoin de trouver 100 milliards d'euros quelque part. Nous pouvons certainement demander un petit effort aux actionnaires, et pas aux 30 % de Français qui sont dans le rouge chaque mois. Ce besoin de justice fiscale correspond à une efficacité économique : les grandes entreprises ont une capacité d'épargne colossale que les ménages modestes n'ont pas.

Une taxe sur le kérosène ne serait pas non plus choquante. Encore une fois, il ne s'agit pas d'interdire l'avion mais de mettre en place le même niveau de fiscalité que pour l'essence. Par ailleurs, nous devons faire très attention à l'usage que nous faisons de la terre. C'est une chose que la filière soit prête techniquement à faire des agro-carburants, mais prenons garde à l'impact sur la biodiversité si nous y consacrons des centaines d'hectares.

Il est très intéressant que BlackRock fasse de l'environnement un véritable sujet mais ce n'est pas suffisant. Il ne suffit pas d'apposer un joli logo dans un rapport d'activité pour diviser par deux les émissions de CO2 dans les 10 ans. Nous devons prendre des mesures plus énergiques.

Sur la question de la défense, je me souviens qu'en 1992, lors de la guerre en Bosnie, tout le monde estimait que le temps de l'Europe était venu. Aujourd'hui, nous ne sommes toujours pas capables d'agir. Il est plus que temps d'avancer sur ce sujet et d'y mettre les moyens financiers nécessaires.

Sur la question de l'ambition sociale, j'ai essayé de montrer qu'on pouvait en même temps lutter pour le climat et créer 5 millions d'emplois utiles et correctement payés. Un logement mieux isolé, c'est un logement plus confortable et un gain de pouvoir d'achat important. L'an dernier, l'Europe a dépensé plus de 200 milliards d'euros pour acheter du gaz et du pétrole à l'extérieur.

Je suis vraiment désolé, mais je dois vous quitter. J'espère que nous pourrons continuer le dialogue. Merci de m'avoir écouté.

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