Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, convoquer, la semaine dernière, une réunion des responsables des différents groupes politiques et des chefs de parti était, de la part du Premier ministre et de tout le Gouvernement, une première marque de confiance dans la représentation nationale. Ce fut un moment d’unanimité – à une exception près. Face à l’adversité, puisse cette unanimité continuer de nous réunir.
Nous donner, ce soir, l’opportunité d’un débat public sur l’action du Gouvernement est primordial pour l’information de nos concitoyens, gage de transparence et de responsabilité. Débattre au Sénat, c’est aussi assurer à nos élus locaux, qui sont, avec les services déconcentrés de l’État, en première ligne, qu’ils sont une partie de la solution.
Une prise en charge globale de la situation nécessite une réponse en matière de sécurité sanitaire, bien entendu, mais aussi des mesures sociales, économiques et numériques, et bien d’autres encore.
Nous approuvons les priorités établies par le Gouvernement : n’agir qu’en fonction de données médicales et scientifiques, et non d’après l’émotion ; faire preuve de réactivité et d’adaptabilité à chaque instant de la crise ; en toute transparence, dire la vérité sur ce que l’on sait comme sur ce que l’on ne sait pas. Alors que la santé des Français est une priorité absolue, la gestion de la crise sanitaire telle que vous la conduisez, monsieur le ministre, montre que nous sommes prêts à faire face au risque d’épidémie.
Voilà près d’une semaine, l’Organisation mondiale de la santé a alerté du risque d’une potentielle pandémie, à la suite d’une multiplication des zones touchées par le coronavirus. À ce stade, quatre-vingts pays ont signalé des cas à l’intérieur de leurs frontières.
Ce n’est pas la première fois, comme il a déjà été souligné, que nous sommes confrontés à une telle situation. Souvenons-nous, mes chers collègues, de la grippe H5N1, du H1N1, du SRAS, du chikungunya, de la fièvre Ebola, ou encore de la maladie à virus Zika, dont les pathologies sont bien plus inquiétantes que celle qui nous préoccupe aujourd’hui. Reste qu’il ne faut rien sous-estimer.
Si la propagation du virus à l’échelle internationale est d’une grande rapidité, nous ne devons pas non plus céder au catastrophisme. Il faut préciser que, dans près de 81 % des cas, cette maladie est largement bénigne.
À l’occasion de l’irruption du Covid-19 en France, les autorités sanitaires ont enclenché le stade 2 du plan de prévention et de gestion, visant à freiner la propagation du virus. Par les actions menées, nous retarderons aussi longtemps que possible le passage au stade 3, correspondant à la circulation réelle et large du virus à l’intérieur du territoire. Mais en cas de passage à ce niveau, monsieur le ministre, quelles restrictions pourraient être mises en œuvre ?
Par ailleurs, un suivi des personnes s’étant rendues dans des zones à risque a été assuré, et des règles de réduction de la vie sociale leur ont été justement imposées. Un décret du 31 janvier dernier prévoit le versement d’indemnités pour arrêt de travail de vingt jours, sans délai de carence ; cette mesure sociale bénéficie également aux parents des enfants dont l’établissement scolaire fait l’objet d’une fermeture temporaire et qui ne peuvent se rendre au travail.
Les clusters évoqués par M. le ministre ont été rapidement détectés. Des mesures raisonnables, mais néanmoins contraignantes, ont été prises au moment opportun. C’est ainsi que certains événements ont été reportés à la suite de décisions locales, dans un souci de prévention de possibles nouvelles contaminations. Monsieur le ministre, pouvez-vous mettre en lumière la cohérence des choix faits en matière d’interdictions et de fermetures ? On songe à la fermeture du marché de Crépy-en-Valois, alors que le supermarché voisin restait ouvert. En la matière, nous devons avoir le souci de la cohérence.
Au regard des dispositifs mis en place localement, nous savons que la réponse sanitaire doit être territorialisée, en métropole comme en outre-mer. Afin de transmettre les recommandations adéquates et de répondre aux inquiétudes légitimes des citoyens, les préfets, les agences régionales de santé (ARS), les professionnels de santé et les élus locaux collaborent en bonne intelligence.
Cette gestion se caractérise par la diffusion d’une information transparente, régulière et de qualité à destination de la population. Ce qui paraît indispensable, compte tenu du nombre de rumeurs qui se propagent sur internet. D’ailleurs, le Gouvernement a tenu avec les principaux moteurs de recherche une réunion de coordination sur ce sujet.
Les Français ont confiance dans notre système de santé et dans sa gestion des crises sanitaires. À ce titre, je salue à mon tour l’ensemble les professionnels qui, aujourd’hui comme hier, se dépensent sans compter pour organiser la mobilisation contre l’épidémie. Chacun de nous se doit de les aider dans cette lutte. Les gestes barrières sont simples : ne soyons donc pas égoïstes !
L’égoïsme, ce serait aussi de jouer avec les peurs, en promettant des mesures inefficaces et attentatoires aux libertés, comme récemment certains politiques. Je pense aux contrôles aux frontières, dont Claude Malhuret a déjà fort bien parlé, voire à la suggestion plus radicale encore de fermer les frontières. Que répondre, si ce n’est que le repli sur soi, que d’aucuns préconisent, n’est jamais la solution ? Ce n’est qu’une incantation illusoire, alors que, d’après l’OMS et tous les experts, les frontières terrestres n’ont pas de sens en matière épidémiologique.
Pour notre part, nous avons choisi de privilégier une coopération européenne et internationale accrue, dans le but d’apporter une réponse collective appropriée. C’est le partage d’informations et d’expériences entre États qui permet de lutter efficacement contre la maladie !
Cette crise sanitaire appelle également des réponses en matière économique à l’échelon européen. De ce point de vue, Bruno Le Maire a très justement posé la question d’une relocalisation de certaines industries et filières stratégiques en Europe.