Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 5 mars 2020 à 14h30
Accélération et simplification de l'action publique — Article 38

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

La suppression de toute référence à un récépissé dans la loi pose d’énormes difficultés. Ce document est remis pour la durée de l’instruction d’une demande de titre de séjour. L’impact de la suppression dans la loi de la notion même de « récépissé » échappera ensuite au législateur, alors qu’il s’agit d’une garantie essentielle pour l’exercice des droits du demandeur.

Il n’est pas du tout acceptable d’imaginer que les files d’attente qui existent dans les préfectures n’existeront plus quand on les aura rendues virtuelles. On double encore les refus ; c’est encore une négation des droits des étrangers.

En outre, l’impact de cette mesure est mal évalué aujourd’hui. Comme cela a déjà été dit, la législation actuelle prévoit précisément la remise d’un récépissé à toute personne admise à soumettre une demande de première délivrance ou de renouvellement d’un titre de séjour. Le récépissé est fabriqué par la préfecture et remis en main propre : c’est un document officiel sérieux. Déjà, aujourd’hui, compte tenu des files d’attente et des difficultés, beaucoup de personnes n’en disposent pas et ne sont pas en mesure de faire valoir leurs droits ni de prouver la régularité de leur séjour quand on le leur demande.

La dématérialisation totale envisagée pose de nombreuses difficultés, que ce soit l’accès à internet, ou encore la maîtrise de la langue. De nouveaux dysfonctionnements sont possibles au vu de ceux qu’on observe autour des queues électroniques dans les préfectures. Les droits associés au récépissé vont enfin être encore plus remis en cause, car tout sera renvoyé à des décrets dont nous ne connaissons pas aujourd’hui la teneur. C’est donc à la fois une perte de droits pour les demandeurs et une perte de capacité du Parlement à garantir ces droits.

Enfin, le contenu des futurs textes d’application est très flou. Le récépissé officiel remis en préfecture sera remplacé, d’abord, par une attestation dématérialisée de dépôt, puis par une éventuelle attestation de prolongation d’instruction, avant que soit finalement remise une attestation de décision favorable. Du point de vue de la simplification administrative, on fait mieux ! Si l’on veut des documents sérieux permettant d’éviter les fraudes, on fait également mieux ! Un récépissé permet de donner des garanties au demandeur. Cette mesure va complètement à rebours de la simplification administrative ; il convient donc de supprimer cet article.

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