Intervention de Sébastien Denys

Commission d'enquête Pollution des sols — Réunion du 4 mars 2020 à 17h45
Audition de Mme Geneviève Chêne directrice générale et M. Sébastien deNys directeur « santé-environnement-travail » de santé publique france

Sébastien Denys, directeur « Santé-environnement-travail » de Santé publique France :

Pour rappeler certaines différences dans les exemples cités, Lubrizol et la vallée de l'Orbiel, sur lesquels nous avons été saisis l'année dernière après les inondations, nous sommes sur deux contextes différents. Dans le premier cas, il s'agit d'un accident industriel où potentiellement nous avons des expositions importantes et immédiates de polluants qui ne sont pas habituellement présents dans l'environnement - l'hydrogène sulfuré (H2S) par exemple. L'évènement crée un traumatisme de la population riveraine : nous sommes dans une situation d'exposition aiguë de la population à un certain nombre de nuisances, ces manifestations aiguës nous étant remontées par notre dispositif de surveillance et les indicateurs de santé.

Dans le cas de la vallée de l'Orbiel, situation que l'on retrouve effectivement sur d'autres sites comme Saint-Félix-de-Pallières mais aussi Saint-Laurent-le-Minier, on recueille des gammes de concentration qui certes sont élevées mais sont des concentrations environnementales usuelles avec lesquelles les habitants ont l'habitude de vivre. L'évènement, qui est une inondation, va amener un surplus de contamination à l'arsenic, qui sera assez invisible, s'il n'y a pas derrière de dépistage. Dans les situations de contamination chronique, la difficulté réside dans le fait que la latence entre l'exposition et le potentiel effet sur la santé peut être extrêmement longue.

Dans le cas de Lubrizol, il y a des intoxications aiguës dues aux fumées. Mais on s'interroge aussi sur les effets chroniques d'autres contaminants notamment les dioxines, qui ont été rajoutés dans l'environnement à cause de l'incendie et qui auront un impact sur la population mais à long terme, indécelable aujourd'hui.

Il est important de comprendre qu'en termes d'expositions, dans un cas on est dans une manifestation aiguë d'un évènement qui va se traduire par des remontées sanitaires, et dans le cas des sites miniers, on a une contamination qui reste à des niveaux comparables dans l'environnement et qui ne se voit pas en termes de manifestations sanitaires et qui se verra peut-être dans plusieurs dizaines d'années.

Dans ce contexte, nous attachons une grande importance à objectiver les expositions. En termes de biosurveillance, on dispose depuis le Grenelle de l'environnement, du programme national de biosurveillance qui nous a permis d'acquérir un certain nombre de données et de prendre du recul, notamment, sur les métaux et l'arsenic. Nous connaissons aujourd'hui les déterminants de l'imprégnation de ces métaux dans la population. Dès lors qu'un déterminant qui peut avoir un impact sur la population est repéré, notre action est de faire des propositions pour intervenir sur ce déterminant dans l'objectif de prévention de santé de la population. En agissant sur le déterminant, l'idée est de réduire si ce n'est de supprimer le risque de développer les pathologies liées à ce déterminant. Cette connaissance de l'imprégnation et des déterminants de l'imprégnation est capitale. Nous poursuivons cette démarche dans le cadre des différents plans nationaux santé-environnement et que nous poursuivrons dans le cadre de la future stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens et du quatrième plan national santé-environnement, le PNSE 4 « Mon environnement, ma santé ».

Ces études sont également déclinées à l'échelle locale, par exemple au niveau des sites miniers du Gard vers le milieu des années 2010. Dès 1994, le réseau national de santé publique a diligenté une étude d'imprégnation sur le site de Salsigne. Nous avons des historiques de contamination assez homogènes. Il est difficile de connaître la part attribuable à la contamination naturelle et à la contamination anthropique. L'intérêt est donc de raisonner à l'échelle nationale. On est dans des gammes de concentration assez proches et on se rend compte que les déterminants sont identiques. Pour diminuer la contamination des enfants au plomb et à l'arsenic, il faut agir sur les poussières intérieures, nettoyer les sols avec une serpillère sèche et ne pas aspirer. Ces prescriptions de l'ARS sont simples à mettre en oeuvre et efficaces. On a des contrastes avec des populations qui appliquent ce type de mesures et celles qui ne le font pas. On voit donc l'efficacité de ces mesures. Pour les polluants volatiles, aérer son logement permet de réduire l'exposition aux polluants. Il s'agit de recommandations dirigées vers le comportement des populations.

Pour les déchets confinés, tout l'enjeu est d'assurer la pérennité du confinement afin d'éviter toute surexposition en cas d'événements extérieurs comme une inondation. Il faut donc là encore agir sur le comportement, c'est un véritable sujet de pédagogie. Il faut s'interroger sur les sources de contamination qui présentent parfois un confinement insuffisant au regard de la réalité du site.

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