Ce projet de loi traduit les annonces faites dernièrement par le Président de la République et précisées par vous, monsieur le Premier ministre. Le Président de la République estime que nous sommes en guerre et assure que l’État soutiendra financièrement notre système de santé et notre économie, « quoi qu’il en coûte ».
Rares sont les situations où l’urgence sanitaire est à ce point caractérisée. Le coronavirus a déjà infecté 200 000 personnes à travers le monde ; plus de 8 200 malades sont décédés. Le nombre de cas recensés en France est en constante augmentation. Désormais, l’Europe constitue le premier foyer de cette terrible pandémie.
Les mesures barrières, pourtant théoriquement suffisantes, n’ont pas été suivies par un grand nombre de nos concitoyens. Aussi le Gouvernement a-t-il dû renforcer les mesures de précaution.
Cette situation sanitaire nous oblige à faire preuve de responsabilité, de réactivité, d’adaptation et de solidarité. Le présent projet de loi en est une illustration.
Son titre II donne une base juridique spécifique à l’urgence sanitaire en répartissant les pouvoirs entre le Premier ministre, le ministre de la santé et, par délégation, le représentant de l’État. La durée de l’urgence reste encadrée et un comité scientifique est institué.
Les temps à venir seront éprouvants pour nos professionnels de santé, qui savent toujours faire passer l’intérêt de leurs patients avant le leur. Toutefois, de nombreux témoignages inquiétants nous parviennent quant au manque de matériels pour nos soignants. Sans ces matériels, c’est la capacité de notre système de santé à combattre cette pandémie qui est mise en danger.
C’est pourquoi je tiens à saluer les initiatives de certains industriels français, grands ou petits, qui produisent désormais des masques ou du gel hydroalcoolique, essentiels pour sécuriser l’activité des soignants, mais aussi celle des aides à domiciles, qui en ont grand besoin.
Je veux, à cette occasion, saluer à mon tour, après les plus hautes autorités de l’État, l’abnégation de nos personnels soignants, dont l’engagement sans faille assure, en ce moment même, la survie et la vie de nos concitoyens, qui les applaudissent chaque soir à 20 heures. Nous espérons que le Gouvernement leur témoignera une reconnaissance autre que symbolique.
Le temps n’est pas à la polémique, mais il conviendra, dans l’avenir, de faire un retour d’expérience de cette crise majeure, pour permettre à notre système de santé de réagir plus vite et d’être mieux préparé. Il faudra aussi que les réponses sanitaires soient coordonnées au moins à l’échelon européen, si ce n’est au niveau mondial.
À la crise sanitaire sans précédent que vivent les Français s’ajoute une crise économique majeure dont les conséquences sont à la fois immédiates et de long terme : immédiates, car la gradation des mesures de protection, jusqu’au confinement généralisé, empêche le fonctionnement d’une très large partie de notre économie ; de long terme, car cette paralysie aura des conséquences sur la pérennité des entreprises, sur l’emploi des salariés et sur notre modèle économique général.
Afin de limiter les conséquences économiques pour les entreprises et de garantir le pouvoir d’achat des Français, le présent projet de loi prévoit un important train de mesures à prendre par voie d’ordonnances. Ces mesures correspondent aux annonces de l’exécutif.
Le Gouvernement réagit de manière globale. Il me semble avoir pris la mesure des difficultés que rencontrent les entreprises, en particulier les TPE-PME et les artisans. Nous saluons les mesures présentées, en particulier celles qui visent à soutenir la trésorerie des entreprises, la mise en place d’un fonds de financement alimenté par l’État et les collectivités locales, mais aussi celles relatives au droit du travail, en particulier à l’indemnisation du chômage partiel.
Toutefois, une interrogation persiste quant au report du versement des cotisations Urssaf pour les petites entreprises, voire à leur remboursement pour celles qui les auraient acquittées par avance.
La question de l’arrêt des chantiers se pose, ainsi que celle du recours au dispositif d’activité partielle pour les entreprises concernées.
Par ailleurs, nous aurions aimé savoir dans quelle mesure les assurances privées pourront être mobilisées au titre des garanties de pertes d’exploitation, par exemple pour les restaurateurs.
Enfin, cette crise devra nous conduire à nous interroger sur nos orientations économiques et sur notre modèle de développement. Elle suscite une réflexion sur la relocalisation des activités économiques. Cela nécessitera d’accompagner les entreprises pour qu’elles fassent ces choix cruciaux, mais aussi, peut-être, de réinvestir dans la formation et l’apprentissage pour retrouver des compétences qui ont souvent été perdues du fait des délocalisations. Nous souhaiterions savoir si le Gouvernement réfléchit déjà à une forme de grand plan de relocalisation et de formation.
Nous ne doutons pas, monsieur le Premier ministre, que votre gouvernement mettra tout en œuvre pour sortir de cette crise et nous vous accompagnerons pour y parvenir.