Intervention de Bruno Le Maire

Commission des affaires économiques — Réunion du 6 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'économie et des finances en téléconférence

Bruno Le Maire, ministre :

S'agissant de la crise pétrolière, le prix du baril s'est effondré : il est actuellement de 33 dollars mais il est descendu jusqu'à 20 dollars. Mon inquiétude porte moins sur l'avenir notre grande compagnie pétrolière nationale que sur l'impact de cette baisse sur de nombreuses entreprises aux États-Unis. Il nous faut être très attentifs à l'effet de la crise sanitaire sur l'économie américaine. Ce pays est la première puissance économique de la planète et l'un de nos partenaires commerciaux majeurs : si la crise sanitaire a un impact lourd sur l'économie et sur les banques américaines, cela aura aussi des conséquences pour la zone euro, et donc pour la France. Or de nombreux investisseurs américains ont investi dans le pétrole de schiste, dont la rentabilité n'est plus assurée quand le prix du baril de pétrole brut passe sous le seuil de 35 dollars. Si le prix du baril reste longtemps sous ce seuil, cela fragilise les sociétés d'exploitation et surtout le secteur bancaire ayant investi dans ces sociétés, avec un risque important d'effet systémique. Il faut veiller à éviter que la crise pétrolière ne se transforme en crise financière par l'intermédiaire de ces sociétés. Au-delà du choc immédiat sur l'économie réelle, j'ai toujours indiqué qu'il fallait faire très attention aux risques de réaction en chaîne, d'un secteur à un autre, d'une économie développée à une autre. Je suis très attentivement la situation américaine, parce que j'estime que le risque est réel pour les économies européennes et pour l'économie française en particulier.

S'agissant de la TICPE, les recettes destinées aux énergies renouvelables seront évidemment fragilisées. Il va de soi que le montant de ces recettes en 2020 ne sera pas équivalent à celui que nous avons connu ces dernières années. Nous devons réfléchir au dispositif à mettre en place au lendemain de la crise pour assurer le bon financement de la transition énergétique, à laquelle nous sommes profondément attachés, car celle-ci sera sans doute encore plus nécessaire qu'elle ne l'était auparavant.

Enfin, je plaide depuis des années pour la reconquête de parts de marché dans l'industrie. Cette crise ne va qu'accélérer la prise de conscience de la nécessité d'assurer notre indépendance en matière industrielle. Nous avions anticipé ce besoin, notamment dans le domaine des batteries électriques, en mettant en place, avec notre partenaire allemand, une filière de production européenne pour éviter de dépendre de la production chinoise ou sud-coréenne. Il faudra faire la même chose pour d'autres filières industrielles stratégiques. Cela prendra du temps et demandera des investissements mais cela me paraît tout à fait nécessaire.

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