Merci pour cette occasion d'échanger sur cette situation inédite qui va requérir les efforts de tous. Vos compétences et vos idées seront essentielles quand il s'agira d'inventer la sortie de crise.
Concernant les transports terrestres de voyageurs, nous avons organisé la mise en place d'une offre minimale : 15 % du trafic ordinaire pour les lignes SNCF, 30 % à la RATP. L'exécution de ce plan s'avère plutôt satisfaisante. Malgré quelques petits dysfonctionnements d'exploitation, on constate que l'offre accompagne le besoin : le nombre de voyageurs est inférieur de 95 % à la normale sur les lignes RATP ; le nombre de métros qui circulent permet donc de respecter les consignes de distanciation. Nous devrions être en mesure de maintenir cette offre durant toute la période de confinement. Notre relation quotidienne avec les dirigeants de la SNCF, de la RATP et de l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP) est excellente. Nous avons aussi des contacts fréquents avec les organisations sociales. Il est devenu possible de reprendre quelques chantiers à des fins, notamment, de sécurisation. Il est important de pouvoir les mener, à temps, dans des conditions opérationnelles satisfaisantes. Quant aux masques et aux autres formes de protection sanitaire, nous avons évidemment accompagné ces entreprises dans leurs commandes, notamment au travers du pont aérien. Les risques sociaux sont circonscrits dans ce secteur d'activité, même si la situation exige que nous prenions les mesures d'accompagnement adéquates.
S'agissant du transport routier et de la chaîne logistique, dont le rôle essentiel a été souligné, soulignons que les flux ont été très déstructurés : des points de tension sont apparus dans les dernières semaines, notamment pour l'emballage, les pâtes et les oeufs. Didier Guillaume et moi tentons de les résorber, en lien avec les organisations patronales et syndicales. Outre notre action sur les aires de service autoroutières, nous avons mis en oeuvre divers assouplissements et dérogations. Un décret a détaillé les mesures qui viennent protéger tous les travailleurs de la chaîne logistique. Un guide, a priori signé par l'ensemble des acteurs, dressera dans les tout prochains jours le cadre des conditions d'exploitation et de la protection sanitaire dans ce secteur. Différents sous-secteurs - déménagement, transport sanitaire, transport d'espèces monétaires - ont fait l'objet d'une attention particulière. Dans l'ensemble, la chaîne logistique tient le coup. Ses travailleurs font montre d'un engagement extraordinaire : les applaudissements quotidiens de 20h00 s'adressent aussi à tous ceux qui permettent à ces secteurs essentiels, notamment l'agroalimentaire, de fonctionner normalement. Je profite de cette occasion pour les remercier à mon tour.
Le transport aérien subit un impact économique considérable. On observe une réduction de 98 % environ du trafic aérien en France. Des chiffres voisins sont relevés dans tout le monde développé ; seule la Chine commence à reprendre les vols ordinaires. La soutenabilité financière de toutes les compagnies aériennes est fragilisée. L'activité du groupe Air France-KLM est aujourd'hui essentiellement constituée des vols de rapatriement et de ceux qui garantissent la continuité territoriale au sein de la métropole comme avec les outre-mer, auxquels s'ajoute un trafic très réduit vers les capitales européennes. Hier, 18 vols ont été opérés par Air France, contre un millier habituellement.
La situation s'est corrélativement dégradée pour le groupe Airbus. Situation inédite, toutes les régions et les compagnies du monde freinent en même temps. Il faudra stabiliser la production et la livraison d'avions. Une réflexion stratégique, nationale et européenne, est donc nécessaire.
Les aéroports connaissent aujourd'hui une activité minimale. Nous travaillons à la protection de leur personnel dans l'exploitation subsistante comme dans les procédures de nettoyage. Une réflexion est entamée, avec leurs responsables, quant au soutien financier qui sera nécessaire. Cette très bonne coopération devra se prolonger au cours de la remontée progressive de l'activité.
Le secteur maritime fonctionne correctement ; le trafic de fret reste à un bon niveau à Dunkerque ou à Calais. L'activité des navires de passagers est en revanche beaucoup plus limitée ; les lignes de ferrys sont maintenues, mais avec un volume modeste. Nous observons la dynamique du transport maritime de marchandises : l'activité de la Chine repart, alors que l'Inde se ferme et que les États-Unis sont au ralenti.
Pour finir, je veux dire un mot de l'« après ». Dans le domaine économique, il faudra mettre en oeuvre des mesures de soutien que vous connaissez déjà : nous devons tenter de prévoir les conséquences économiques de la crise dans les différents secteurs, tâche éminemment difficile. Nul ne peut décrire quel sera l'état de santé du transport aérien dans six ou douze mois. Il nous faut élaborer la stratégie la mieux à même de défendre les intérêts français dans toutes les hypothèses.
Nous avons commencé à mener, avec les principaux opérateurs, des travaux de préfiguration du déconfinement. Sans aucun calendrier connu, nous devons préparer les mesures de protection sanitaire, pour les usagers comme pour le personnel, et les procédures d'exploitation qui seront nécessaires durant la période de remontée en charge du trafic. Nous menons ce travail très fin sous la coordination de Jean Castex.