Intervention de Amadou Sall

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 20 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de Mm. Pierre-Marie Girard directeur international de l'institut pasteur et amadou sall directeur de l'institut pasteur de dakar référent de l'union africaine pour la crise du covid-19 sur la pandémie de covid-19 en afrique en téléconférence

Amadou Sall, directeur de l'institut Pasteur de Dakar :

Le réseau des instituts Pasteur est membre de l'assemblée mondiale de l'OMS depuis quelques années, ce qui nous permet de prendre part aux grandes décisions de l'organisation.

Nous ne sommes qu'au début de l'épidémie en Afrique. La dynamique de celle-ci est très différente suivant les pays. Elle est très dépendante des stratégies retenues, des conditions sociales et économiques locales, du système de santé. Dans certains pays peuvent se poser des problèmes de diagnostic et de reporting, mais pas de manière colossale - cela se verrait rapidement.

On constate que, plus on s'y prend tôt, plus la stratégie est rapidement cohérente, mieux on peut affronter l'épidémie, comme on a pu l'observer en Europe et en Asie. De ce point de vue, le contact local sera déterminant. On peut donc s'attendre à une diversité de situations selon les pays.

Oui, il y a beaucoup de désinformation en Afrique, sur les médicaments ou sur un certain nombre de mesures. Au Sénégal, le ministère de la santé a une vraie stratégie de communication, de transparence, qu'il me paraît important de saluer, pour rebâtir la confiance. Comme dans la plupart des pays, les fake news relayées sur les réseaux sociaux posent problème.

La France est partie prenante au projet de production de tests rapides par l'institut Pasteur de Dakar dans le cadre de l'initiative Diatropix. La Fondation Mérieux et l'Institut de recherche pour le développement (IRD) font ainsi partie des bailleurs « historiques » qui ont contribué financièrement à la mise en place de cette plateforme et qui vont continuer à suivre le projet. Celui-ci a également été financé par l'un de nos partenaires industriels, Mologic, qui est britannique, mais la France est très présente. Elle l'est également dans d'autres projets, par exemple sur l'hépatite B et la méningite.

En matière de prévention des épidémies, tous les pays collaborent dans le cadre juridique du règlement sanitaire international de l'OMS, avec une stratégie fondée sur le confinement en cas d'épidémie, une approche globale plutôt qu'une approche aux frontières et, surtout, une adaptation aux situations plutôt qu'un cadre préexistant.

Ce mécanisme important assure, aujourd'hui, un reporting régulier. Il comprend un système d'alerte, des appels internationaux d'urgence et associe des processus de mobilisation de ressources. La mise en oeuvre de cette réglementation depuis 2005 a entraîné une amélioration significative de la situation. Le dispositif de coopération a également été énormément organisé. Comme nous devrons de plus en plus faire face à des épidémies, nous espérons que cette dynamique perdurera.

L'accès universel aux vaccins et aux traitements est une question extrêmement importante. Sur ce plan, le risque est considérable pour les pays africains. Cela doit être un point de vigilance. Des mécanismes, comme la CEPI, existent pour garantir cet accès universel, mais une production locale est essentielle. L'institut Pasteur de Dakar est le seul producteur de vaccins préqualifié par l'OMS en Afrique. Le Président de la République française et les présidents africains peuvent peser dans la balance, car il y a une véritable compétition dans l'accès à ces vaccins.

Pour ce qui concerne la dette et sa prise en compte dans la construction du système de santé, j'espère que rien ne sera plus comme avant après le Covid-19. Voilà une vingtaine d'années, nous avons connu un désengagement dans le domaine de la santé, entraînant un certain nombre de retards. À cet égard, le débat sur la dette doit être une opportunité. Il faudra vraiment que l'humain soit mis au centre du nouvel ordre mondial. Cela ne doit pas rester une incantation.

Nous sommes très engagés dans des partenariats de recherche clinique entre l'Europe et l'Afrique. Ainsi, nous avons remporté plusieurs appels d'offres de l'EDCTP. Actuellement, nous sommes candidats à des ressources pour effectuer des recherches sur le Covid-19.

Comment approvisionner les Français qui sont ici ? Au Sénégal, l'ambassade de France joue un rôle extrêmement actif. Certains de nos collègues appuient la prise en compte des besoins.

Plusieurs candidats à la mise au point d'un vaccin contre le Covid-19 sont actuellement en cours d'évaluation. Les plus optimistes évoquent le dernier trimestre 2020 ; d'autres, 2021. Les essais cliniques ont débuté. Il faut être extrêmement prudent.

Le prototype de test rapide en cours d'évaluation donne des résultats prometteurs. La date limite est en juin prochain, mais nous essayons de faire plus vite encore.

Les prestations des instituts Pasteur sont gratuites dans le contexte épidémique, grâce à une levée de fonds. En période non épidémique, elles sont relativement accessibles, mais gardent un coût, lié à la qualité du service.

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