Intervention de Sophie Primas

Commission des affaires économiques — Réunion du 14 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de m. cédric o secrétaire d'état chargé du numérique en téléconférence

Photo de Sophie PrimasSophie Primas, présidente :

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de vous présenter devant nous pour évoquer un sujet que l'allocution du Président de la République hier a placé au coeur de l'actualité. Cette audition s'inscrit dans le cadre du contrôle de l'action du Gouvernement en cette période de crise, qui est avant tout une crise sanitaire. Notre commission est pleinement mobilisée : nous avons déjà entendu les principaux ministres relevant de nos compétences, et les responsables des cellules de veille, de suivi et d'anticipation qui ont été mises en place auditionnent depuis deux semaines de nombreux professionnels sur différents secteurs, dont le numérique.

Le Président de la République a annoncé hier soir la poursuite de la période de confinement pour au moins quatre semaines, ainsi que la continuation et l'amplification des mesures de soutien à l'économie.

Vous êtes secrétaire d'État chargé du numérique et, avec cette crise, la France, comme le reste du monde, se met au 100 % numérique. Je formulerai trois observations pour lancer ce débat.

D'abord, l'épreuve que nous traversons présente à la fois des opportunités et des risques pour le secteur du numérique. Au chapitre des risques, nous constatons nos faiblesses dans ce secteur stratégique. « Nain numérique », « colonie numérique » : les termes ne manquent pas pour décrire notre situation. C'est sur Google, Facebook ou Twitter que nous recherchons les informations, sur les systèmes d'exploitation d'Apple et de Google que nous surfons... Et c'est en Californie que l'on profite de la crise pour expérimenter les livraisons par véhicule autonome. Même au Sénat, nous peinons à trouver un logiciel de visioconférence aussi performant que le logiciel Zoom, dont nous connaissons pourtant les faiblesses.

Le risque, c'est aussi que la crise conforte l'hégémonie de ces géants. Selon un récent sondage, neuf Français sur dix souhaitent une relocalisation des entreprises industrielles. Monsieur le secrétaire d'État, après la crise, le temps ne sera-t-il pas venu de mettre en oeuvre une stratégie de souveraineté numérique, comme le recommandait la commission d'enquête sénatoriale présidée par Franck Montaugé ?

Toujours sur le plan des risques, la crise touche de nombreuses start-ups du secteur. Vous nous direz en quoi les mesures adoptées par le Gouvernement sont adaptées à la situation particulière de ces jeunes pousses. Vous avez annoncé en début d'année que les investisseurs institutionnels s'engageaient à financer ce secteur à hauteur de 6 milliards d'euros ; qu'en est-il ?

Du point de vue des opportunités, le développement du commerce électronique est évidemment accéléré par la fermeture de certains commerces et les mesures de confinement. Pour éviter que cette opportunité ne profite qu'à Amazon, il faut développer les mesures d'accompagnement du petit commerce vers le commerce en ligne, à l'image de ce que fait La Poste avec la plateforme « Ma ville, mon shopping ». La France est en retard dans la numérisation de ses entreprises, en particulier ses commerces de proximité. Les commerçants en sont conscients : des programmes de formation à leur adresse, autrefois boudés, sont aujourd'hui plébiscités. Il en va de même pour le fonds d'aide au numérique pour les commerces mis en place par la région d'Île-de-France. Que fait le Gouvernement pour se saisir de cette opportunité ?

Par ailleurs, cette crise transforme la fracture numérique en gouffre, au niveau tant des réseaux que des usages. Cette fracture, qui amplifie les inégalités sociales et territoriales, suscite une grande inquiétude dans nos territoires. Peut-être évoquerez-vous également les difficultés que connaissent les déploiements, liées au confinement.

Enfin, le Président de la République a également annoncé hier soir la consultation du Parlement sur l'application de traçage, qui fait en ce moment l'objet d'une réflexion. Il convient que cette consultation prenne la forme d'une véritable saisine, assortie d'une étude d'impact détaillée, reposant sur des analyses scientifiques. Cette saisine devra porter sur un projet précis et détaillé et faire suite à la publication d'avis de tous les experts, a minima le Conseil d'État pour le droit, la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés) pour la protection de la vie privée, l'Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information) pour la cybersécurité. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous vous engager à respecter ces conditions ?

Enfin, le ministre dont dépend votre secrétariat d'État, Bruno Le Maire, a indiqué que son ministère n'était pas chargé du développement de cet outil de traçage, qui relèverait des ministres de l'intérieur et de la défense. Or, on entend que vous travaillez avec le ministre de la santé sur ce sujet. Qui en sont les pilotes ?

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