Intervention de Brune Poirson

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 29 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de Mme Brune Poirson secrétaire d'état auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire sur les répercussions de la crise du covid-19 sur la gestion des déchets en téléconférence

Brune Poirson, secrétaire d'État :

La protection des ripeurs, des éboueurs, a toujours été une préoccupation de mon ministère. Ils constituent en effet la deuxième ligne, et leur travail, qui est difficile, est indispensable. Ces agents disposent des équipements de protection individuelle (EPI), qui sont nécessaires à leurs activités en dehors de la crise actuelle et qui étaient déjà prévus. Le souci de sécurité de ces agents est général, en dehors de la pandémie, c'est une question de protection au travail.

Nous avons demandé un avis scientifique pour savoir si le contexte imposait de changer les protections habituelles. Le HCSP a rendu un avis sur la gestion des déchets d'activités de soins à risque infectieux (Dasri) et un autre sur les déchets ménagers. Le premier recommande que les Dasri soient traités par la filière classique ; le second préconise, en matière de collecte des déchets ménagers, l'application aux agents des mesures barrières pour éviter la contamination, ainsi que le maintien des protections habituelles. Selon lui, le port du masque pour la collecte et le tri des déchets n'est pas nécessaire. Je vous l'ai dit, un guide de bonnes pratiques a été élaboré sur la base de ces recommandations, et le ministère du travail dispose de fiches métiers, parmi lesquelles une fiche dédiée à la collecte des déchets. Par ailleurs, certains acteurs du secteur fournissent des masques anti-projections en sus des dispositions prévues par le cadre réglementaire.

Pour assurer la continuité de l'activité, nous avons proposé de prêter aux entreprises du secteur des masques FFP2 et FFP3 ; 18 000 masques ont ainsi été prélevés sur les stocks stratégiques de Santé publique France (SPF), sous réserve que la filière soit solidaire, afin que chaque entreprise et certaines collectivités locales puissent en bénéficier et qu'elle rende à SPF un nombre équivalent de masques quand ses approvisionnements seront assurés. Il n'y a donc pas de tension sur ces produits. Nous travaillons pour garantir la disponibilité des stocks, par exemple en groupant les commandes avec celles d'autres filières industrielles.

Le risque de recrudescence des dépôts sauvages est lié à la fermeture de certaines déchetteries publiques, dans lesquelles il était parfois difficile de faire respecter les gestes barrières et dont le personnel a dû être réaffecté à d'autres services. Le Gouvernement a été vigilant et a permis aux particuliers de porter leurs déchets dans les points d'apport restés ouverts en se munissant d'une attestation dérogatoire - je vous rappelle que 40 % des déchetteries publiques et 75 % des déchetteries privées sont ouvertes. Lorsque cela n'est pas possible, les particuliers doivent stocker leurs déchets à domicile. La tendance est néanmoins positive : de plus en plus de déchetteries publiques rouvrent, car les collectivités locales savent que c'est impératif pour préserver les boucles vertueuses de l'économie circulaire. La Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec) a mis en place une carte des déchetteries ouvertes, à destination des artisans du BTP qui reprennent certains chantiers dans des conditions permettant le respect des gestes barrières. Nous recommandons donc aux collectivités qui le peuvent le maintien de l'activité des déchetteries, dans le respect des consignes sanitaires, en permettant, par exemple, la prise de rendez-vous en ligne. Il s'agit de faciliter la reprise de l'activité des artisans et de garantir un gisement de déchets verts, nécessaire pour composter les boues des stations d'épuration. La situation est hétérogène, mais on est en phase de reprise ; un plan plus global est en cours de discussion avec les collectivités territoriales, car d'autres matériaux doivent être récupérés rapidement.

Le secteur du papier et du carton n'a pas connu de problème d'approvisionnement, l'industrie agroalimentaire en est particulièrement consommatrice, mais des stocks avaient été accumulés avant la crise, et la demande a baissé. Certains acteurs redoutent toutefois une tension et une hausse des cours, mais il n'y a pas de risque de rupture d'approvisionnement, car l'offre et le stock permettent de répondre à la demande.

S'agissant du textile, la plupart des points d'apport n'ont plus été collectés, en raison du ralentissement de l'activité de l'économie sociale et solidaire. Des opérateurs comme le Relais ont même demandé de ne plus trier les flux. Nous travaillons à un plan de reprise d'activité.

En ce qui concerne l'impact de cette crise sur l'économie sociale et solidaire, il faut relever que celle-ci est très présente dans le secteur du déchet : textile, réparation, collecte des encombrants ou encore ressourceries. Or ces activités ont subi un très fort ralentissement : la quasi-totalité des ressourceries a fermé, la collecte et le tri des déchets textiles ont cessé. Beaucoup d'acteurs de l'économie sociale et solidaire ont mis en place des mesures de chômage partiel, mais celles-ci ne sont pas toujours durables. Il y a quinze jours, Emmaüs a ainsi dû lancer un appel aux dons pour la première fois. Ces acteurs ont besoin de visibilité sur la reprise d'activités des partenaires - entreprises, collectivités, éco-organismes - dont ils dépendent. Ils participent au point quotidien du secteur, sous la forme d'un appel entre les services du ministère, mon cabinet et toute la filière déchets. Nous travaillons collectivement à un plan de reprise et nous identifions les mesures complémentaires qui pourraient être nécessaires.

S'agissant de la mission de pôle de suivi des REP confiée à l'Ademe, prévue par la loi, nous souhaitons que ses effectifs ne soient pas compris dans le plafond d'emplois de l'Ademe. Ce point doit faire l'objet d'un arbitrage interministériel, qui aboutira sans doute cet été. Mon cabinet a des échanges nourris avec les autres ministères sur ce sujet crucial.

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