Intervention de Philippe Varin

Commission des affaires économiques — Réunion du 29 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe Varin président de france industrie en téléconférence

Philippe Varin, président de France Industrie :

La captation de nouveaux marchés internationaux est une voie de reprise pour nos entreprises, car certaines d'entre elles ont connu des effets d'éviction, ainsi qu'une baisse de la demande traditionnelle. À ce stade, il convient de pérenniser tous les mécanismes de soutien financier à l'export qui ont été mis en place à l'occasion de cette crise, notamment les garanties bancaires, et de les développer à l'échelon européen.

Les capacités des mécanismes de garantie à l'export, comme ceux portés par Bpifrance, doivent être augmentées, notamment pour soutenir l'activité aéronautique. Des mesures interdisent actuellement aux agences de crédit-export d'intervenir en faveur du pays constructeur d'un matériel qui est exporté : il faut lever cette interdiction de financer. Ce sont des sujets sur lesquels nous devons travailler. Sur le terrain, je salue l'important programme qui a été mené sur l'Industrie du futur, avec la digitalisation de 10 000 entreprises. Dans la même perspective, avec l'aide de Bpifrance, nous devons soutenir nos entreprises pour les aider à aborder les marchés export.

Aucune de nos dix-huit filières n'est en danger de disparition, mais certaines parties de ces filières le seront si nous ne sommes pas capables de les aider en sortie de crise. C'est le cas notamment de l'automobile.

La France a fait des propositions sur le MIC, mais celui-ci doit être cohérent avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il convient le mettre en place, sans qu'il constitue une mesure préférentielle pour nos entreprises : nous devrons donc assurer une compensation. C'est une proposition qui peut tenir la route et qui est soutenue par des pays européens de plus en plus nombreux.

Je ne connais pas suffisamment le contenu des CPER pour m'exprimer à leur sujet. Au vu de la période couverte, cela peut être un bon outil et cela mérite d'être étudié. Il faudra alors que cet outil porte une vision globale, mais aussi qu'il aborde tous les volets : le volet digital, le volet compétences, le volet environnemental, etc. Il faut aussi qu'il soit un outil opérationnel - les considérations trop générales ne sont pas opérationnelles -, comme nous le faisons au Conseil national de l'industrie. Nous allons examiner comment nous pouvons contribuer en pratique à cette réflexion à l'échelon régional.

Je crains qu'il n'ait été fait une mauvaise interprétation de la proposition du Medef. L'essentiel est que nous évitions un chômage massif de sortie de crise. Beaucoup doit se faire au niveau local et dans les entreprises, car c'est là que tout va se passer. Au niveau national, nous travaillons sur certaines thématiques comme les accords d'entreprises, le prêt de main-d'oeuvre, etc. Les mesures générales sur le temps de travail ne me paraissent pas d'actualité.

Je suis d'accord avec Laurent Duplomb sur le coût du chômage structurel. C'est un coût extrêmement important et souvent invisible pour l'économie. Nous avions décidé de travailler sur ce sujet dans le cadre du Pacte productif, notamment sur la gestion prévisionnelle de l'emploi, afin d'orienter les formations vers les nouveaux métiers ; ces réflexions vont se poursuivre, mais elles sont devenues moins urgentes.

Nous avions également travaillé sur l'inclusion des personnes qui se trouvent en dehors de la « boucle économique » : comment faire en sorte que les 4 % de chômeurs structurels puissent retrouver le chemin de l'emploi avec l'aide des entreprises ? Ce sujet va rester d'actualité. La priorité doit être donnée au traitement en temps réel des nouveaux chômeurs et afin d'en éviter le plus possible. Les questions relatives au chômage structurel devront être réabordées lorsque nous serons sortis de la période très difficile que nous allons traverser.

Dans nos accords commerciaux bilatéraux, l'adéquation de nos importations aux normes environnementales européennes est prioritaire. Mais le diable réside souvent dans le détail des négociations. Je fais confiance à Thierry Breton pour relayer nos préoccupations auprès du commissaire européen au commerce.

La stratégie carbone est une ambition politique française et européenne. Elle est dimensionnée par la menace qui pèse sur nous et sur les générations futures. Elle ne me semble pas menacée par le prix du baril de pétrole. Par ailleurs, les marchés du pétrole sont très réactifs : dès que le prix du baril est inférieur à un certain niveau, les investissements nouveaux s'arrêtent et l'offre se réduit. Je pense donc que d'ici deux ou trois ans le marché sera rééquilibré ; je ne suis pas pessimiste sur ce sujet.

Enfin, les collectivités territoriales risquent en effet être exsangues dans les deux ou trois prochaines années.

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