Intervention de Yvon Collin

Réunion du 14 octobre 2008 à 16h00
Logement et lutte contre l'exclusion — Discussion générale

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, dans une société où la cohésion sociale menace en permanence de se fissurer, dans une société où la cellule familiale se rétrécit de plus en plus, dans une société où l’individualisme est devenu, pour beaucoup, un mode de vie, le logement constitue à l’évidence le dernier havre sécurisé dans lequel chacun est censé s’épanouir.

Encore faudrait-il pour cela que le logement soit une évidence pour tous. Hélas, nous le constatons régulièrement, nos concitoyens ne sont pas logés à la même enseigne.

L’accès au logement est devenu discriminatoire et profondément injuste. De nombreux dispositifs favorisent avant tout la spéculation foncière et immobilière, contribuant, in fine, au renchérissement des loyers, en particulier dans le secteur privé.

Quant au secteur du logement social, malgré la mobilisation régulière des pouvoirs publics pour rendre les procédures plus justes et plus transparentes, la situation reste figée. Les foyers à ressources modestes sont contraints d’attendre des années avant de bénéficier d’un logement social décent. La crise du logement dure depuis bien trop longtemps. Elle est malheureusement profonde. Nous connaissons les chiffres ; ils sont inacceptables dans un pays comme le nôtre !

En 2008, ce sont encore plus de trois millions de personnes qui sont mal logées ou qui ne sont pas logées du tout. Si l’on ajoute six millions d’individus en situation de réelle fragilité à court terme et à moyen terme, la France, pays des droits de l’homme, manque à ses devoirs car, oui, le logement est un droit, un droit que beaucoup n’ont pas ou n’ont qu’en partie.

Qu’en est-il du concept de « droit au logement opposable » inscrit dans la loi du 5 mars 2007 ? Le droit au logement est, une fois de plus, resté lettre morte pour toutes les catégories de Français qui n’ont pas les ressources financières suffisantes pour accéder à un logement décent dans un contexte d’envolée des loyers et d’explosion des charges.

Que reste-t-il de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement ? Plusieurs textes en si peu de temps témoignent d’une certaine incapacité de l’État en la matière.

À l’heure où la crise financière risque de se répercuter sur l’économie réelle, entraînant nombre de nos concitoyens dans la spirale du chômage et de la précarité, cette question va devenir de plus en plus aiguë, madame le ministre.

Allons-nous devoir laisser une nouvelle fois les associations pallier les échecs des politiques nationales successives ? Sans le travail formidable d’Emmaüs, d’ATD Quart Monde, du Secours populaire et de bien d’autres, la situation serait encore plus critique !

Il est temps de cesser l’accumulation de dispositifs inopérants et d’exiger de l’État une obligation de résultat. Le Gouvernement avait affiché un objectif de 500 000 logements par an. Avec un nombre de mise en chantiers en repli de 9, 5 % au cours des dix derniers mois, ce sont seulement 400 000 logements qui ont été livrés sur cette période. De même, alors que le budget pour 2008 avait prévu 142 000 logements, 100 000 seulement ont été programmés.

Au regard de ces difficultés, madame le ministre, vous avez pris l’initiative d’une nouvelle mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Au sein du RDSE, nous souscrivons tous aux objectifs affichés dans ce projet de loi et nous nous félicitons de voir réaffirmées quatre grandes priorités.

Construire davantage de logements est en effet une nécessité pour répondre à la crise de l’offre qui engendre un certain nombre de dérives, parmi lesquelles la spéculation immobilière.

Favoriser l’accession populaire à la propriété est urgent, car c’est évidemment un grand progrès social que de permettre aux plus démunis d’être propriétaires et d’avoir ainsi la possibilité de transmettre un héritage.

Ouvrir davantage l’accès au parc de logements HLM est indispensable pour permettre une meilleure rotation des logements et faire entrer tous ceux qui répondent aux critères, en veillant toutefois au maintien du principe de mixité sociale.

Lutter contre l’habitat indigne dans les quartiers anciens dégradés est également une bonne chose, sauf si l’amélioration qualitative des quartiers visés conduisait finalement à chasser les plus démunis ; cela a été dit.

Sur tous ces points, madame le ministre, on peut aisément se retrouver. En revanche, mon appréciation diverge quant aux moyens proposés pour répondre à toutes ces ambitions affichées.

Tout d’abord, les dispositifs retenus seront-ils réalisables dans le contexte d’une baisse des crédits consacrés à la mission « Ville et logement » ? Une diminution de 6, 9 % est prévue en 2009. Le budget de la mission devrait poursuive sa cure d’amaigrissement en 2010 et en 2011.

On attend vos réponses sur les moyens budgétaires, d’autant que le Président de la République a annoncé, le 1er octobre dernier, un certain nombre de mesures qui visent à soutenir la conjoncture actuelle et qui concernent directement le logement. Est-on certain, avec la perspective de moins-values fiscales pour l’État, de pouvoir concrétiser l’extension du Pass-foncier, le relèvement du plafond des ressources ouvrant droit aux prêts d’accession sociale et le rachat à un prix décoté de stocks de 30 000 logements ? Sur ces points, la représentation nationale aimerait obtenir des garanties plus pertinentes et plus justes que l’annonce de l’utilisation du surplus du livret A.

Pour revenir au texte qui nous occupe, plusieurs dispositions ne me semblent pas de nature à résoudre la question cruciale du logement.

S’agissant de l’offre de logements, la remise en cause de l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, pose un problème aux radicaux de gauche ; vous vous en seriez doutée !

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