Monsieur Hervé, vous avez considéré comme opportuniste le fait d’introduire les problématiques du Brexit dans ce texte. Je le répète, il y a urgence à rassurer, à protéger et à amener tous les Français à se préparer, comme l’a dit M. Ladislas Poniatowski.
Ce texte montre que le Gouvernement prévoit un certain nombre de choses, mais que, pour autant, de nombreux aspects ne dépendent pas de nous. Ainsi, accord ou pas, la situation sera différente après le Brexit, pour ce qui concerne les contrôles et les procédures, que nous souhaitons les moins invasifs possible. J’y insiste, un accord de libre-échange ne signifie pas « zéro contrôle ». D’ailleurs, nos entrepreneurs, nos agriculteurs et nos pêcheurs nous demandent de contrôler ce qui entrera sur le territoire du marché intérieur, parce qu’il y va de la crédibilité européenne.
Monsieur Poniatowski, selon vous, une habilitation de quinze mois est trop longue. Vous incitez ainsi à la vigilance sur les mesures « balai ». Entre l’accord de retrait et le large accord commercial auxquels nous travaillons, nous voyons apparaître des angles morts. Je pense notamment aux conditions d’exercice d’un certain nombre de professions libérales, qui ne seront peut-être pas couvertes par l’accord commercial et qui ne sont pas concernées par l’accord de retrait.
Certains pourraient vous dire que nous n’avons pas besoin de texte. Je préfère, au nom du Gouvernement, donner aux personnes concernées une sécurité juridique absolue sur le fait qu’elles pourront continuer à exercer leurs activités. C’est un sujet que nous sommes aujourd’hui capables d’identifier.
Ces sujets d’angle mort ou de frottement apparaîtront si l’accord commercial ne couvre pas tout le champ permettant de préserver la capacité des ressortissants britanniques à exercer leurs activités chez nous. Nous devons être capables de leur dire que nous ne mettrons pas de barrières à la poursuite de leur activité en France : c’est un signal politique fort, que vous souhaitez également envoyer.
Permettez-moi de revenir sur la question du délai de quinze mois. Si vous pensez que nous sommes en capacité d’avoir un bon accord dans sept mois, je vous suis et le délai d’habilitation de quinze mois n’est effectivement plus opportun. Mais Michel Barnier le dit avec insistance, nous n’avons pas, aujourd’hui, réuni les conditions d’une bonne négociation nous permettant de préserver nos intérêts, y compris après avoir fait du chemin, et de nous assurer que, sur la gouvernance, la pêche et des conditions de concurrence équitables, cet accord nous permet, pour les dix ou vingt ans à venir, d’envisager les choses avec confiance.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, pour ne pas revenir devant vous avec la même disposition dans six mois, vous propose de nous faire confiance pour les quinze prochains mois, sur les quatre sujets dont nous parlons.
Bien sûr, nous souhaiterions pouvoir négocier douze mois de plus avec les Britanniques. Ni Michel Barnier ni moi-même n’avons aujourd’hui le pouvoir d’imposer ce point de vue. Il est donc important que le Parlement envoie un signal politique fort.
Au fond, il y a deux discussions parallèles : comment le Gouvernement français échange-t-il avec son Parlement ? quel signal le Parlement envoie-t-il à son Gouvernement en termes de confiance ? Il s’agit de nous donner douze mois de plus pour trouver un meilleur accord que ce que les Britanniques veulent nous proposer sous la contrainte du temps. C’est un débat utile, qui permettra d’envoyer un signal diplomatique. Je le concède, il n’est pas de même nature que les demandes d’habilitation traditionnelles, ce qui rend peut-être les choses plus difficilement lisibles.
Je suis ici parfaitement honnête en vous disant qu’il y a là non pas une manigance, mais la volonté de nous mettre tous ensemble dans une position de force face aux Britanniques, pour soutenir Michel Barnier.