Au milieu de la crise que nous connaissons, il faut saluer l’engagement sans faille de tous les professionnels, en première ou seconde ligne, mais aussi de tous les bénévoles qui ont continué à faire vivre la solidarité. Les associations ont pu maintenir leurs activités et redoubler d’efforts, malgré des difficultés importantes d’un point de vue logistique, mais aussi économique. À ce titre, je veux rappeler la situation alarmante d’Emmaüs, qui a dû faire appel aux dons pour la première fois depuis sa création. J’espère qu’il y aura une fin heureuse et un engagement massif de l’État.
Parallèlement, plus de 260 000 personnes se sont inscrites sur la plateforme jeveuxaider.gouv.fr, intégrant de fait la réserve civique. Malheureusement, cet engagement exemplaire est aujourd’hui en train d’être totalement dénaturé. On le sait, un certain nombre d’entreprises ayant une mission de service public ne pourront pas, dans les semaines qui viennent, reprendre leur pleine activité.
L’exposé des motifs du projet de loi évoque notamment La Poste, qui fonctionne à flux tendu depuis des années. Ainsi, l’absence d’un certain nombre de salariés pour des raisons de santé ou de garde d’enfants conduit l’entreprise à de grandes difficultés pour remplir sa mission de service public. La seule solution qu’a trouvée le Gouvernement, c’est de recourir à la réserve civique. Dit autrement, il s’agit de remplacer des salariés par des bénévoles.
Vous le comprendrez, cela nous pose deux problèmes.
Tout d’abord, du côté des salariés, on nie ainsi leur savoir-faire, en les mettant en concurrence avec des personnes bénévoles, d’autant, faut-il le rappeler ici, que ce dumping social est déjà partiellement à l’œuvre, avec l’ouverture toujours plus grande des structures d’accueil du service civique, à tel point que l’Agence du service civique elle-même s’inquiète de la recrudescence des emplois déguisés au sein du dispositif.
Ensuite, du côté des bénévoles, ils se sont inscrits sur la plateforme et se sont engagés dans la réserve pour faire fonctionner la solidarité et venir en aide aux personnes dans le besoin. Il ne s’agissait pas pour eux de faire fonctionner des entreprises en remplaçant des salariés ! Les limitations apportées par la rapporteure en commission sont un premier pas, mais nous semblent encore insuffisantes pour régler vraiment le problème.
Si on reprend l’exemple de La Poste, les réservistes pourraient se retrouver en position de distribuer le courrier ou la presse ou de tenir les guichets de La Banque postale.
Une telle situation pose question, surtout quand on se rappelle la vocation de la réserve civique. C’est la raison pour laquelle il ne nous paraît pas légitime d’aller vers une telle extension.