Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, merci à Josiane Costes de nous avoir conduits à traiter de ce sujet si important. La France a signé la Convention internationale des droits de l’enfant, mais combien de lignes de ce texte restent lettre morte et non respectées ? Selon un chiffre de 2018, 306 000 mineurs sont pris en charge par l’aide sociale à l’enfance ; les juges des enfants ont été saisis, toujours en 2018, de 126 145 mineurs en danger, et 122 mineurs ont été victimes d’infanticide ; le nombre d’appels au 119, numéro d’urgence pour l’enfance en danger, a augmenté de 113 % pendant les deux mois du confinement ; la plateforme d’accueil de l’enfance en danger a vu le nombre des appels qu’elle reçoit augmenter de 56 % par rapport à l’an dernier.
Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, cela a été dit : le travail de l’ensemble des personnels de l’ASE, dans tous les départements de notre pays, est essentiel pour faire face à cette situation.
Des enfants sont victimes de violence ; à cet égard, je dois regretter, au nom de Mme Michelle Meunier, que deux amendements qu’elle avait déposés aient été retoqués, une fois encore, en vertu du fameux article 45 de la Constitution, qui est toujours appliqué ici dans des conditions que je juge déplorables. Car enfin, que l’éducation et l’action sociale doivent s’exercer sans aucune violence ni morale ni physique, cela va de soi. Mais il n’est sans doute pas inutile de le dire ! C’est en tout cas ce qu’a pensé Mme Michelle Meunier, qui m’a chargé de vous faire part de sa réaction.
S’agissant des articles 1er, 2 et 4 de la proposition de loi, nous partageons totalement la position de M. Alain Marc, le rapporteur, car nous pensons que ces mesures pourraient être préjudiciables à l’enfance, au lien entre les parents et les enfants, à la possibilité qui doit être donnée aux parents de revenir en arrière eu égard à un certain nombre de procédures.
Pour ce qui est des allocations familiales, nous avons proposé un amendement de suppression de l’article 9 pour laisser – cela nous semble opportun – une capacité d’appréciation au juge. Et je remercie la commission de s’être elle aussi prononcée contre cet article.
Je conclurai par quelques mots sur les mineurs isolés non accompagnés, en commençant par redire, monsieur le secrétaire d’État – mais vous l’avez entendu si souvent que vous en êtes persuadé –, que la prise en charge de ces mineurs exige, sur le plan financier, un plus juste équilibre entre l’État et les départements. C’est nécessaire ! Les départements ne pourront plus continuer à assumer cette mission dans les conditions actuelles.
Ce que propose Mme Costes est très intéressant : introduire une présomption de désintérêt pour faciliter la prise en charge de ces jeunes par les services de l’enfance ; désigner, pour ceux-ci, le juge des enfants – on peut en discuter ; favoriser l’accès à un compte en banque – lorsque des mineurs reçoivent une bourse sans pouvoir la percevoir, il y a quand même quelque chose qui ne va pas, et Jean-Yves Leconte présentera un amendement très précieux à ce sujet tout à l’heure ; favoriser l’attribution de titres de séjour au bénéfice de mineurs non accompagnés intégrés dans un cursus professionnel ; généraliser l’accompagnement des jeunes majeurs jusqu’à 21 ans.
Ces mesures vont dans le bon sens. Les 40 000 jeunes non accompagnés – cela a été dit – sont d’abord des êtres humains, et ils sont ici ! Or, vous le savez, mes chers collègues, seuls 42 % de ces jeunes sont reconnus mineurs. Les autres doivent, pour obtenir cette reconnaissance, faire un recours – c’est très compliqué et cela pose des quantités de problèmes.
Ce sujet est encore largement devant nous. Merci, madame Costes, de nous avoir donné l’occasion de l’évoquer à la faveur de l’examen de cette proposition de loi. Je sais que vous entendrez ce message, monsieur le secrétaire d’État.