Intervention de Michel Canevet

Réunion du 28 mai 2020 à 14h30
Plafonnement des frais bancaires — Articles additionnels après l'article unique

Photo de Michel CanevetMichel Canevet :

Cet amendement part certainement d’une très bonne intention : porter une attention particulière aux plus fragiles de nos concitoyens. C’est tout à fait légitime.

Cela dit, il faut quand même déterminer l’opérationnalité des dispositifs que nous adoptons. Mettre en place des dispositifs qui ne peuvent être opérationnels ne me semble pas être utile ou de bon sens.

Il est question dans cet amendement de la période d’urgence sanitaire, mais cette proposition de loi ne sera pas adoptée avant le 10 juillet prochain. Si de telles dispositions devaient être ainsi mises en place, ce serait a posteriori. Il me semble que ce serait extrêmement compliqué.

En outre, cet amendement vise les seules commissions d’intervention, alors qu’il aurait fallu évoquer l’ensemble des frais bancaires.

La mise en œuvre du dispositif proposé me paraît par ailleurs difficile. Pour identifier la clientèle concernée, il faudrait prendre bien des mesures et, notamment, élaborer des fichiers pour lesquels l’accord de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) serait nécessaire, dans la mesure où il s’agirait de l’identification de personnes par un processus complexe qui risque d’être stigmatisant. En tout cas, je vois mal comment tout cela pourrait être rapidement mis en œuvre : c’est pourquoi je juge que ce dispositif n’est pas opérationnel.

Enfin, une telle mesure risque de rendre difficile la situation de La Banque postale, dont la clientèle compte nombre de personnes figurant parmi les plus fragiles. Le président de La Banque postale m’a prévenu qu’il fallait veiller à ne pas priver cet établissement des moyens de continuer sa mission de service public au service de la population et, en particulier, des plus fragiles. Cette mission coûte de l’argent ; il faut donc lui donner les moyens de la remplir.

Selon moi, ce dispositif n’étant pas opérationnel, il ne serait pas bon de le faire figurer dans la loi. Je suggérerais plutôt au Gouvernement de mener des discussions avec les établissements bancaires pour bien leur faire comprendre que, dans cette période difficile, ils doivent se montrer attentifs aux situations des plus fragiles. Les publics qui bénéficient d’aides pourraient ainsi être exonérés de facto de commissions d’intervention et autres frais bancaires, de manière à ce que leur situation ne se détériore pas plus encore : tout cela relève des discussions à mener avec la Fédération bancaire française et les établissements de crédit.

Il me semble que les banques ont déjà pris des dispositions permettant de prendre en compte la situation de ces publics, comme je l’ai rappelé dans mon propos liminaire : des échéances de prêts ont été reportées, certaines cotisations ont été annulées, comme me l’ont confirmé certains établissements bancaires. Cela atteste que les banquiers ont compris la difficulté de la situation ; ils ne sont pas non plus ennemis de la bonne santé financière de leurs clients.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

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