Intervention de Jean-Marc Pastor

Réunion du 4 décembre 2007 à 9h45
Loi de finances pour 2008 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Jean-Marc PastorJean-Marc Pastor, rapporteur pour avis :

Il y a donc deux conditions pour que vive la ruralité.

La première est une péréquation de solidarité nationale. La seconde est une méthodologie, une gouvernance appropriée au monde rural.

Au titre de la péréquation nationale, les autorisations d'engagement, d'un montant de 70 millions d'euros, sont en baisse de 16 %, et les crédits de paiement de 8 %. Cette tendance est très inquiétante, monsieur le ministre.

À cela s'ajoute le changement de périmètre dans la présentation des crédits, qui rend leur lecture totalement opaque.

Quant à la méthodologie et à la gouvernance rurale, on distingue deux niveaux : chaque projet peut faire l'objet soit d'une approche verticale, soit d'une approche horizontale, plus globale et liée au cadre de vie.

À ce sujet, les pôles d'excellence rurale, créés par la loi de 2005 relative au développement des territoires ruraux, ont été une heureuse initiative, monsieur le ministre. Sur les 700 dossiers qui ont été déposés autour de l'économie, de l'emploi ou de l'innovation notamment, 379 ont été arrêtés. La dotation varie entre 300 000 euros et 1 million d'euros par projet, avec un taux de financement public de 33 %.

Après un an et demi de vie, ces pôles suscitent plusieurs remarques.

Première remarque : il s'agit d'un dispositif beaucoup trop complexe. On peut aussi déplorer la concurrence entre les divers projets de développement à l'échelle locale. Alors que les pôles ont été créés à l'origine pour être portés par différents acteurs de terrain, comme les membres des groupements d'action locale, 80 % de ces projets sont maintenant mis en oeuvre par les collectivités locales.

Deuxième remarque : la durée de l'accompagnement est de trois ans. Or, le développement rural ne s'arrête pas à trois ans. Qui prendra le relais si ce ne sont les collectivités territoriales ? La ruralité s'appuie sur une animation permanente des projets. Mais les pôles d'excellence rurale ne financent ni l'animation, ni la recherche, ni l'innovation ; c'est une erreur.

Troisième remarque : le redéploiement de 235 millions d'euros sur 379 pôles s'apparente à du saupoudrage.

Quatrième remarque : il est très difficile, monsieur le ministre, de saisir pour ces projets les mécanismes de suivi et d'évaluation qu'il convient de mettre en oeuvre.

J'en viens maintenant à la méthodologie et à la gouvernance du monde rural.

En 2006, M. Dominique Bussereau m'avait invité, avec un certain nombre de vos collaborateurs ici présents, monsieur le ministre, à participer à une mission sur la ruralité. Il s'agissait d'apprécier les différences d'approche des politiques de développement et d'utilisation des fonds européens de certains Etats membres de l'Union.

La copie a été rendue, des pistes proposées, la plupart d'entre elles étant d'ailleurs peu, voire pas coûteuses. Où en est-on, monsieur le ministre ?

Le constat fait apparaître que la France est parmi les plus mauvais utilisateurs des fonds européens. L'Espagne et l'Autriche ont mis en place des mécanismes de management rural portés par des systèmes associatifs, coopératifs, regroupant tous les partenaires acteurs en les responsabilisant. Cela devient une force et les coopératives rurales telles que nous avons pu les observer, regroupant des collectivités territoriales, des socioprofessionnels, diverses personnalités, représentent une vraie locomotive pour la démocratie participative.

À l'époque, cette démarche avait reçu l'adhésion de tous les participants. Comment a-t-elle évolué, monsieur le ministre ?

Cette réflexion intègre d'autres pistes. Ainsi en est-il de l'élevage ovin en montagne, qui fait l'objet d'une mission d'information confiée à MM. Gérard Bailly et François Fortassin. Je pourrais également citer le pastoralisme.

Monsieur le ministre, après le Grenelle de l'environnement, que deviendront ces pistes agroenvironnementales et les ouvertures qui ont été faites ?

Cette intervention ne me permet d'aborder qu'une faible partie des problèmes de la ruralité. Je n'ai pas le temps d'évoquer les services privés ou publics, qui suscitent une véritable interrogation.

La baisse des crédits, le défaut d'engagement politique fort, l'absence de réponse sur les attendus de la mission de 2006, tout cela n'appelle pas un grand enthousiasme de ma part. Je regrette, à titre personnel, le manque d'ambition de la politique du Gouvernement en matière de développement rural. Néanmoins, selon une tradition bien établie au Sénat, je m'en rapporte à la sagesse de la commission qui propose bien sûr de voter les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

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