Intervention de Emmanuel Capus

Réunion du 3 juin 2020 à 15h00
Imposition de solidarité sur le capital — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Emmanuel CapusEmmanuel Capus :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le rétablissement de l’ISF fait figure non pas de sparadrap, mais de révolution. Cette idée, comme un astre sur son orbite, ressurgit depuis 2017 à intervalles réguliers dans le ciel de notre hémicycle. Elle prend tantôt la forme d’une proposition de loi, tantôt celle d’un amendement au projet de loi de finances, et, aujourd’hui, celle d’une proposition de résolution.

Entre « résolution » et « révolution », une seule lettre de différence ; mais la différence tient parfois à une seule lettre. Ainsi, après l’instauration de l’IFI en remplacement de l’ISF, il nous est maintenant proposé de passer à l’ISC. Après tout, si les mots comptent, les lettres aussi ! Hier impôt de solidarité sur la fortune, demain, peut-être, impôt de solidarité sur le capital : fortune ou capital, telle est la question.

Mais derrière ces mots ronflants, qui sonnent comme des titres de magazines d’actualités économiques, un concept fait son retour : la justice sociale. Qu’est-ce que la justice sociale ? Vaste sujet…

On peut commencer par dire ce qu’elle n’est pas. Les auteurs de cette proposition de résolution ont ainsi pris soin de la distinguer de la haine des riches. Dans le climat social qui est le nôtre, c’est une précision heureuse, à tout le moins bienvenue. Néanmoins, précision ne vaut pas définition, car ce concept est souvent brandi en étendard, mais rarement défini au niveau des principes. Or c’est là tout l’enjeu.

La justice sociale ou fiscale ne saurait simplement signifier toujours plus d’impôt pour les riches, et même, parfois, pour les moins riches, comme s’il s’agissait d’une loi analogue à la loi de la gravitation universelle. Les auteurs de cette proposition de résolution en réfèrent à l’esprit de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Permettez-moi d’en citer la lettre : son article XIII dispose que « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

C’est donc déjà interpréter ce texte que de considérer que l’égale répartition dont il est question justifie la progressivité, a fortiori d’y voir la justification d’un nécessaire impôt sur les hauts patrimoines en temps de pandémie mondialisée. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne justifie nullement le rétablissement de l’ISF. Il ne s’agit là que d’une interprétation particulière, qui se fonde sur un diagnostic émis sur la société et renvoie à des choix politiques.

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